Ardennes 1944/1945

Comme en mai 1940, les Ardennes jouent un rôle essentiel dans les opérations menées à l’Ouest en 1944 et 1945. Après avoir défait les Allemands en Normandie, les Alliés se précipitent vers les frontières du Troisième Reich sur un front large qu’elles atteignent dès début septembre 1944. Après avoir franchi la Meuse face aux débris des forces allemandes en retraite, les Américains percent le Westwall sur l’Our et ratent l’une des opportunités de rentrer profondément en Allemagne avant le raidissement de la Wehrmacht qui gèle les positions jusqu’au déclenchement de l’opération Wacht am Rhein / Herbstnebel.

Pendant plus d’un mois, les Ardennes deviennent l’un des champ de bataille les plus disputés à l’Ouest et représentent la dernière réelle tentative stratégique allemande de renverser le sort de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Si la contre-offensive initiée par Adolf HITLER échoue, elle contribue à façonner le monde de l’après-guerre en laissant l’Armée rouge le temps de conquérir l’ensemble de l’Europe de l’Est laissant Josef STALINE en position de force dans ses discussions avec les Alliés occidentaux.

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Historique

Contexte

Le 6 juin 1944, les Alliés débarquent en Normandie dans le cadre de l’opération Overlord. Après plusieurs semaines d’intenses combats, les Américains finissent par percer les lignes allemandes avec l’opération Cobra. Malgré un enveloppement imparfait de la poche de Falaise et faute d’empêcher les restes des unités allemandes de franchir la Seine, les Alliés peuvent néanmoins se lancer dans la libération de la France, aidés par le débarquement en Provence, en cherchant à atteindre rapidement les frontières du Troisième Reich. Une véritable course contre la montre s’installe des deux côtés en septembre 1944, d’un côté pour essayer de mettre fin à la guerre avant Noël, de l’autre pour stabiliser la situation à l’Ouest en même temps qu’en Italie, en Prusse orientale, en Pologne, en Hongrie et dans les Balkans.

Dessin de couverture du jeu The Battle of the Bulge d’Avalon Hill

L’avance alliée

Le calme avant la tempête

L’offensive allemande

Cependant, les débuts de l’offensive sont compromis avant même son lancement par l’attaque américaine sur Kesternich le 13 décembre 1944 dans la cadre de l’offensive sur les barrages de la Roer afin de d’extirper la laborieuse bataille de la forêt de Hürtgen. Sans s’en rendre compte, les Américains obligent les Allemands à mobiliser d’urgence des unités destinées à l’assaut initial pour stopper l’attaque et reconquérir le terrain perdu, celui-ci donnant ensuite une vue sur les axes d’arrivée des unités allemandes amenées à se déployer dans le plus grand secret. Les 272. Volksgrenadier-Division, 277. Volksgrenadier-Division et 326. Volksgrenadier-Division sont impactées et ne sont pas dans les meilleures dispositions pour jouer le rôle qui est attendu d’elles aux premières heures de l’offensive.

Or c’est justement sur elles que repose à l’aile droite la percée initiale de la 12. SS-Panzer-Division Hitlerjugend qui avec la 1. SS-Panzer-Division Leibstandarte Adolf Hilter sous l’égide du I. SS-Panzer-Korps doivent franchir la crête d’Elsenborn afin de permettre à la 6. Panzer-Armee de passer la Meuse entre Liège et Huy.

Samedi 16 décembre 1944 : des débuts laborieux

Si l’attaque allemande surprend totalement les Américains, tant au niveau tactique que stratégique, elle démarre fort mal. Aucune percée n’est réalisée, la progression se limite au maximum à demi-douzaine de kilomètres à l’intérieur des lignes américaines. La situation pourrait sembler comparable à celle qui prévaut à la fin de la première journée de l’opération Cobra. Avec une différence de taille : les défenseurs bénéficient de réserve à proximité du front qui, si elles sont mises en route assez vite, peuvent venir boucher le trou à temps quand les premières lignes céderont sous le poids du nombre.

Dimanche 17 décembre 1944 : les Américains, au bord de l’effondrement, bloquent encore les Allemands

Lundi 18 décembre 1944

Mardi 19 décembre 1944

Mercredi 20 décembre 1944

Jeudi 21 décembre 1944

Vendredi 22 décembre 1944

Samedi 23 décembre 1944

Dimanche 24 décembre 1944

Lundi 25 décembre 1944

Mardi 26 décembre 1944

Mercredi 27 décembre 1944

Jeudi 28 décembre 1944

Vendredi 29 décembre 1944

Samedi 30 décembre 1944

Dimanche 31 décembre 1944

Lundi 1er janvier 1945

Mardi 2 janvier 1945

Les Alliés contre-attaquent

Les civils durant la bataille

Plusieurs crimes de guerre sont également commis durant cette bataille. Les civils sont durement éprouvés par les destructions, la faim, le froid, les morts et blessés collatéraux, les meurtres perpétrés de sang-froid.

Crimes de guerre

Dénouement

Déclenchée le 16 décembre 1944, l’opération Wacht am Rhein / Herbstnebel représente la dernière réelle tentative d’Adolf HITLER pour tenter de renverser le cours de la Seconde Guerre mondiale alors que le Troisième Reich se retrouve dans une situation particulièrement critique après un été 1944 catastrophique sur tous les fronts principaux. assiégé d’un côté par l’Armée rouge et de l’autre côté par les Alliés occidentaux. Le rétablissement opéré néanmoins par la Wehrmacht à l’automne 1944 après permet la reconstitution de réserves. Préparée dans le plus grand secret et prenant les Alliés par surprise, car incapables de détecter les intentions allemandes, les chances de succès de la contre-offensive s’évaporent dès les premières heures de l’opération Wacht am Rhein / Herbtsnebel.

La pertinence de la réaction alliée permet de capitaliser sur les échecs allemands de deux premiers journées de l’offensive et ne laisse aucune possibilité d’aboutir à un succès, même opérationnel. Après l’échec de parvenir sur la Meuse, les Allemands se concentrent sur Bastogne dans un dernier espoir de décrocher un succès tactique symbolique, jusqu’à ce que les Alliés reprennent l’initiative sur l’ensemble du saillant à partir du 3 janvier 1945. Mais encore une fois, les Allemands parviennent à gagner du temps et à éviter l’anéantissement de leurs unités engagées dans le saillant.

Les Alliés occidentaux doivent panser leurs plaies avant de penser à relancer l’offensive en direction de la Ruhr qui passe inévitablement par le franchissement du Rhin

Alors que l’offensive Vistule-Oder déclenchée le 12 janvier 1945 fait exploser les défenses allemandes rétablies péniblement à l’automne 1944, les Allemands n’ont plus les moyens de relancer une quelconque action offensive, la priorité étant donnée désormais à ralentir l’avance de l’Armée rouge en Prusse orientale et vers Berlin, le cœur du Troisième Reich désormais exposé, non plus uniquement aux bombardements alliés, mais directement par les pointes soviétiques au sol.

Analyses thématiques

Ardennes 1940 / Ardennes 1944, symbole de la décrépitude militaire allemande après quatre ans de combats

L’analogie entre la percée des Ardennes en mai 1940 et la contre-offensive de l’hiver 1944/1945 peut paraître séduisante. Dans les deux cas, l’axe d’effort allemand s’explique et représente un choix réfléchi. Pourtant les deux situations présentent de très nombreuses différences :

  1. Conditions météorologiques : le terrain détrempé puis la neige gênent considérablement la progression des unités sur les routes et chemins des Ardennes, d’autant plus que les chars sont plus lourds en 1944 qu’en 1940, sans parler des conditions de combat rendues difficiles par le froid et l’humidité
  2. Conditions climatiques (saison hivernale) : en plus des différences climatiques, les journées plus courtes ralentissent le tempo des opérations, le niveau des cours d’eau limite les passages à gué dès lors que les ponts sont détruits ou encore tenus par l’ennemi
  3. Effet de surprise : en 1940, l’attaque allemande est attendue, mais son point d’effort n’est pas correctement apprécié par les Alliés tandis qu’en 1944, l’attaque allemande même est une surprise
  4. Stratégie défensive : en décembre 1944, les Alliés font le choix volontaire d’adopter un dispositif léger dans les Ardennes pour économiser des forces et parce qu’ils ont deux grandes masses de manœuvre de part et d’autre (au sud, la 3rd US Army qui s’apprête à se lancer sur la Sarre, au nord la 1st US Army qui débouche enfin de la forêt de Hürtgen)
  5. Déficiences qualitatives : si la Wehrmacht réussit à rassembler hommes et matériels pour reconstituer ses unités, elle n’a pas les moyens de les entrainer et de les intégrer correctement, ce qui est d’autant plus préjudiciable que les conditions et les matériels de haute technologie demandent davantage de formation – en 1940, l’armée allemande est bien plus homogène et les composantes de ses unités mieux intégrées, ses hommes sont familiers avec leurs équipements et les tactiques du combat terrestre
  6. Rigidité offensive : contrairement à 1940, l’armée allemande est sclérosée par plusieurs années de guerre, la concentration des décisions mêmes tactiques au niveau d’Adolf HITLER, les cadres expérimentés sont fatigués, usés et exercent leurs fonctions dans la peur d’être accusés de désobéissance ou de défaitisme – la vitesse de réaction, l’opportunisme et l’adaptabilité ont changé de camp
  7. Combativité défensive : les premières lignes américaines résistent très bien pendant les quarante-huit premières heures de l’attaque allemande malgré un rapport de force totalement défavorable et ne se replient pas à la différence des opérations de retardement menées en 1940 par les Chasseurs ardennais et la cavalerie blindée française
  8. Réactivité : les premières unités sont alertées envoyées en renfort dès le premier jour de l’offensive allemande, le glissement de la 2nd US Infantry Division joue ainsi un rôle majeur dans l’échec du I. SS-Panzer-Korps à forcer les Hautes Fagnes tandis que l’envoi de la 10th US Armored Division permet de gagner quelques heures autour de Bastogne permettant à la 101st US Airborne Division de s’y installer, les arrivées conjuguées des 30th US Infantry Division, 82nd US Airborne Division avec des premiers éléments de la 3rd US Armored Division bloquent et anéantissent la Kampfgruppe Peiper – cette réactivité tranche avec la passivité des Alliés en mai 1940 devant le franchissement du canal Albert et de la Meuse dès le 10 mai 1940 dans les secteur de Maastricht, puis lors des franchissements de Dinant, Monthermé et Sedan
  9. Prime au plus léger : les chars allemands (Panzer V et Panzer VI Ausf. B) sont handicapés par l’étroitesse du terrain de combat, des routes et des ponts dans les Ardennes, l’impact des conditions météorologiques et climatiques pour se déplacer sur des mauvais chemins et hors voies viabilisées sans pour autant bénéficier de leurs avantages en termes de puissance, de portée et de protection, alors que les chars américains plus légers sont plus à l’aise et réduisent leurs handicaps
  10. Domination aérienne : sans être nulle, la présence de la Luftwaffe ne permet pas à l’aviation alliée d’intervenir partiellement dès les 17 et décembre 1944 et plus massivement ensuite, à la grande différence de 1940
  11. Profondeur défensive : quand bien même la Meuse serait franchie, les Alliés disposent d’un rideau défensif supplémentaire avec le positionnement d’unités britanniques sur le fleuve

Conclusion

La bataille des Ardennes est tout autant une défaite allemande qu’une victoire américaine. Elle ne peut cependant avoir lieu qu’en raison d’une succession d’erreurs alliées à partir de la fin de la bataille de Normandie qui permettent à l’armée allemande de se ressaisir.

Si elle enlève désormais toute possibilité à l’armée allemande de retourner la situation à l’Ouest, elle a un impact majeur sur le long terme. En effet, le retard pris par les Alliés occidentaux de mi-août 1944 à mi-janvier 1945 ouvre un boulevard à la domination soviétique sur l’Est de l’Europe en affaiblissant le rapport de force aux dépends des Américains et Britanniques face aux Soviétiques qui va conditionner le partage des zones d’influence pour les cinquante années suivantes qui constituent la Guerre froide.

Localités et lieux

Voir aussi…

Bibliographie

Repères historiographiques

Livres

Magazines et périodiques

Ludographie

Assurément, la bataille des Ardennes inspire les concepteurs et amateurs de wargames ! Il existe en effet pléthore de jeux à différentes échelles et de dimensions variées.

Au niveau opérationnel

Si la bataille des Ardennes dure un mois, les jeux proposés au niveau de la campagne se concentrent principalement sur la phase offensive allemande et s’arrêtent au pire, la veille de la contre-attaque alliée généralisée pour réduire le saillant.

TitreEditeurAnnée de publicationEspace tempsEchelleNombre de pions
The Battle of the BulgeAvalon Hill198116/12/1944 au 02/01/19451 hex = 2 miles (3,2 km)377
A Time for TrumpetsGMT200216 au 31/12/19441 hex = 1 mile (1,6 km)2304
Last BlitzkriegMMP201616 au 31/12/19441 hex = 1km1680
1944 Battle of the BulgeWorthington202016 au 25/12/1944?100+
Ardennes IIMMP202316 au 31/12/19441 hex = 1 mile (1,6 km)560

Historique de la page

  • Dernière mise à jour : 29/02/2024