Historique
La 130. Panzer-Lehr-Division est une division blindée allemande de la Seconde Guerre mondiale. Formée début 1944 à partir d’éléments issus des écoles de l’arme blindée allemande pour repousser le débarquement allié attendu à l’Ouest, son premier engagement se déroule en Hongrie lors de l’opération Margarethe. Elle revient en France moins d’un moins avant le Débarquement en Normandie et prend ses quartiers dans l’Eure près de Chartres. Troisième division blindée allemande engagée en Normandie après la 21. Panzer-Division et la 12. SS-Panzer-Division, elle ne parvient jamais à jouer le rôle offensif qui devait être le sien. Prenant de plein fouet le choc du bombardement aérien au lancement de l’opération Cobra, elle parvient à s’échapper de la poche de Falaise / Trun / Chambois puis à se replier sur le Westwall. Elle y joue un rôle défensif important face aux premières avancées américaines au-delà de l’Our puis en Lorraine et dans la Sarre. Lors de l’opération Wacht am Rhein / Herbstnebel dans les Ardennes, elle perd plus de deux jours à percer les premières lignes américaines tout comme les autres unités de la 5. Panzer-Armee et de la 6. Panzer-Armee. Ratant l’opportunité de s’emparer de Bastogne avant l’arrivée de la 101st US Airborne Division, elle se retrouve vite bloquer dans son avance vers la Meuse. Parvenant à se replier avant d’être encerclée par l’offensive alliée en tenaille, elle combat ensuite en Hollande et sur le Rhin en Allemagne. Elle disparait finalement encerclée dans la poche de la Ruhr.

Mise sur pied
Depuis l’abandon de l’opération Seelöwe et le lancement des préparatifs opérationnels de l’opération Barbarossa, la priorité militaire allemande est donnée au front soviétique. Les échecs successifs (notamment Moscou, Caucase, Stalingrad, Koursk) et l’impossibilité de redresser favorablement la situation en faveur du III. Reich ne permettent pas de relâcher la pression sur les besoins en matériels et en hommes, bien au contraire.
A partir du second semestre 1943, la menace se précise également sur les autres fronts. Suite à l’abandon de l’Afrique du Nord, la Sicile puis la péninsule italienne sont directement visées par les Alliés. Mais tout porte à croire que le débarquement décisif se déroule sur les côtes en face de la Grande-Bretagne. Il n’est dès lors plus question de continuer à ponctionner les moyens stationnés à l’ouest de l’Europe. Le 3 novembre 1943, Adolf HITLER signe sa directive n°51 qui fixe le cadre du renforcer des moyens militaires sur ce théâtre d’opérations. L’Atlantikwall est concerné, mais pas seulement puisqu’il est également question d’accroître les capacités au sol, sur mer et dans les airs.
C’est dans ce cadre qu’est ordonné le 30 décembre 1943 la mise sur pied de la 130. Panzer-Lehr-Division en puisant dans les effectifs présents dans un certain nombre d’écoles situées sur le territoire du Reich et l’Infanterie-Lehr-Regiment 901 qui combat en tant qu’unité indépendante depuis 1941. La zone de rassemblement est fixée en Lorraine et les transferts commencent immédiatement. Elle fait donc partie des divisions blindées allemandes formées dans la deuxième partie du conflit aux dépens du maintien en condition opérationnelle des unités existantes. Elle est cependant bien équipée et dotée de personnels de qualité compte tenu de ses origines.
La constitution des différentes composantes de la division s’effectue dans le contexte de pénurie généralisée en hommes et en moyens de combat qui sévit alors dans l’armée allemande. Ainsi, afin de compléter son régiment de chars, la I./Panzer-Regiment 6 de la 3. Panzer-Division engagée en URSS lui est temporairement attribuée. La 130. Panzer-Lehr-Division récupère ou absorbe également des éléments en provenance d’autres unités.

Hongrie, opération Margarethe
Au milieu de la nuit du 5 au 6 mars 1944, l’état-major de la division reçoit l’ordre de rejoindre la région de Vienne et se mettre sous les ordres du LVIII. Reserve-Korps. Les mouvements se font en chemin de fer et débutent dès le 7 mars 1944. Le trajet prend deux jours. Le 10 mars 1944, l’ensemble des éléments mobilisés arrive à destination.
Le 19 mars 1944, les Allemands déclenchent l’opération Margarethe et pénètrent en Hongrie. La 130. Panzer-Lehr-Division intervient au sein du LVIII. Reserve-Korps aux côtés de la 16. SS-Panzergrenadier-Division, d’éléments de la 5. SS-Panzer-Division et d’unités de support. Partant de la frontière occidentale commune entre le III. Reich et la Hongrie, le LVIII. Reserve-Korps se dirige en direction du secteur de Budapest. L’opération est un succès. La 130. Panzer-Lehr-Division participe aux actions de contrôle puis à différentes manœuvres militaires afin de poursuivre son entrainement.
Le 29 avril 1944, ordre est donné de transférer la division en France pour être mise à disposition de l’OB West. Les premiers convois partent par voie ferrée dès le lendemain 30 avril 1944. La zone de regroupement n’est plus la Lorraine mais le secteur entre Chartres et Le Mans. Les éléments précurseurs arrivent à Chartres le 5 mai 1944. Les dernières unités arrivent le 10 mai 1944.
Dans l’attente du Débarquement allié
Les semaines de mai 1944 sont employées à poursuivre l’entrainement et à reconnaître différents itinéraires que la division pourrait employer en cas d’invasion alliée.
Cependant, début juin 1944, devant la dégradation de la situation en URSS, l’OKW ordonne d’y renvoyer immédiatement la I./Panzer-Regiment 6 auprès de la 3. Panzer-Division. Le premier convoi ferroviaire part le 5 juin 1944…
Dépendant théoriquement de l’OB West, la division ne peut être cependant employée sans l’autorisation de l’OKW que contrôle étroitement Adolf HITLER.
Normandie 1944
Réaction au Débarquement du 6 juin 1944, l’impossible contre-attaque décisive
Le 6 juin 1944, à l’annonce du Débarquement allié, la division suspend immédiatement le départ des prochains convois de la I./Panzer-Regiment 6.
En début d’après-midi, l’OKW libère la 12. SS-Panzer-Division et la 130. Panzer-Lehr-Division afin de les assigner à la 7. Armee qui est en charge du secteur face au Débarquement.
Afin de pouvoir contre-attaquer dès le lendemain, les unités se mettent en route en fin d’après-midi et affrontent plusieurs attaques aériennes alliées avant que la nuit ne tombe. Plusieurs destructions freinent également la progression. La division est subordonnée au I. SS-Panzer-Korps qui doit alors coordonner la contre-attaque allemande avec trois divisions blindées (avec la 12. SS-Panzer-Division en cours de transfert et la 21. Panzer-Division déjà sur place). Le transfert des unités prend cependant trop de temps et aucune attaque coordonnée ne peut être lancée comme prévu le 7 juin 1944. Les premiers éléments de la 12. SS-Panzer-Division ne peuvent que stopper la progression de la 3rd Canadian Infantry Division qui déborde Caen par Carpiquet.
Au cours de cette journée, les convois de la division continuent de se frayer un chemin vers le front. La voiture du commandant Fritz BAYERLEIN est détruite, lui-même est légèrement blessé, lors d’une attaque aérienne juste avant la tombée de la nuit. Son chauffeur est tué.
Au centre de la zone d’invasion, la défense allemande s’effondre. La 50th (Northumbrian) Infantry Division s’empare de Bayeux et une brèche commence à s’ouvrir. La 716. Infanterie-Division a quasiment disparu et la 352. Infanterie-Division est en grande difficulté.
8 et 9 juin 1944, l’espoir de repousser les Alliés
Les premiers éléments entrent au contact des Alliés à la limite du secteur de la 3rd Canadian Infantry Division et celui de la 69th Infantry Brigade dans une grande confusion et sans véritable coordination avec la 12. SS-Panzer-Division. Les combats se concentrent sur Brouay et Audrieu. La division perd déjà deux chefs de corps, celui du régiment d’artillerie, capturé puis mortellement blessé dans des conditions assez obscures, et celui d’un des deux régiments de Panzergrenadiere, blessé par un bombardement naval.
En fin de journée , la chaîne de responsabilité allemande face au Débarquement allié se réorganise. La Panzergruppe West prend en charge l’aile droite, dont le I. SS-Panzer-Korps, tandis que la 7. Armee reste en charge de l’aile gauche.
Dans la nuit du 8 au 9 juin 1944, la 130. Panzer-Lehr-Division se redéploie dans le secteur de Tilly-sur-Seulles et laisse le secteur de Brouay à la seule 12. SS-Panzer-Division.
Le 9 juin 1944, l’objectif est de reprendre Bayeux. Les Panzer IV de la division sont pour la première fois engagés au combat. La progression est satisfaisante et permet de reprendre Ellon. Mais la progression britannique en direction de Tilly-sur-Seulles menace le flanc de l’attaque qui doit être stoppée. La 130. Panzer-Lehr-Division est déjà sur la défensive.
Tilly-sur-Seulles
De violents combats défensifs se déroulent le 10 juin 1944 durant lesquels les Britanniques ne parviennent pas à passer. Le soir, le quartier-général de la Panzergruppe West est bombardé et ravagé à La Caine. Hors de combat, la coordination de l’aile droite allemande est transférée directement au I. SS-Panzer-Korps.
Les Britanniques déclenchent l’opération Perch le 11 juin 1944 en attaquant frontalement les lignes allemandes dans le secteur de Tilly-sur-Seulles dans l’espoir de faire sauter le verrou de Caen par l’ouest. Lors d’une contre-attaque blindée autour de la cote 103, le commandant de la II./Panzer-Regiment 130 est tué.
Les combats continuent le lendemain 12 juin 1944. Les premiers éléments de la 2. Panzer-Division qui arrive en renfort arrivent à proximité de la ligne de front. Mais la situation se dégrade à la gauche de la 130. Panzer-Lehr-Division. La 352. Infanterie-Division ne peut plus contenir l’avance de la 1st US Infantry Division qui progresse en direction de Caumont-l’Eventé. Les Britanniques saisissent l’opportunité de contourner le verrou de Tilly-sur-Seulles en retirant la 7th Armoured Division pour lui faire réaliser un vaste crochet par l’ouest.
La progression de la 7th Armoured Division est stoppée nette le 13 juin 1944 à Villers-Bocage et doit se replier. La menace est provisoirement écartée, mais à nouveau, les renforts allemands ne sont engagés qu’à des fins défensives.
Au cours des jours suivants, la 130. Panzer-Lehr-Division s’épuisent dans les combats défensifs pour tenir Tilly-sur-Seulles face aux assauts frontaux britanniques. La 50th (Northumbrian) Infantry Division finit par s’en emparer le 17 juin 1944 mais la 130. Panzer-Lehr-Division parvient à emp^cher toute exploitation vers le sud. La ligne de front allemande s’appuie désormais sur Hottot-les-Bagues et Fontenay-le-Pesnel. A gauche se trouve la 2. Panzer-Division, à droite la 12. SS-Panzer-Division.
Le front reste alors relativement calme jusqu’au 25 juin 1944 quand les Britanniques déclenchent l’opération Martlet sur Fontenay-le-Pesnel menée par la 49th (West Riding) Infantry Division.
Opérations Martlet et Epsom
Mise en réserve
Bataille de Saint-Lô
Opération Cobra
Fin de partie en Normandie
Repli à travers la France et la Belgique
Sur le Westwall
Reconstitution et engagement en Sarre
Bataille des Ardennes
Derniers combats
En février 1945, elle s’oppose aux poussées alliées sur la Meuse en Hollande et à Wesel. En mars 1945, elle tente de contre-attaquer à Remagen pour reprendre le pont tombé aux mains des Américains, mais sans succès. Ses derniers éléments se rendent dans la poche de la Ruhr le 15 avril 1945 à la 99th US Infantry Division.
Bibliographie
Livre
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- Frédéric DEPRUN, Francheville, 12 août 1944, une reconnaissance en force de la 2ème DB [Normandie 1944 Magazine n°2 (Heimdal, 2012)]
- Frédéric DEPRUN & Baptiste FLOTTE, Fontenay-Rauray, autopsie d’une bataille (2ème partie) [39/45 Magazine hors-série Normandie 1944 n°16 (Heimdal, 2018)]
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Ludographie
Avalon Hill
- The Battle of the Bulge [Avalon Hill, 1981]
Historique de la page
- Dernière mise à jour : 05/12/2023