Trucks & Tanks Magazine n°99 (Caraktère, 2023)

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Entre d’intéressantes brèves d’actualité (qui ne sont pas de reprises d’un blog à l’accès gratuit mais travaillées par les auteurs du magazine) et un dossier à tiroirs sur l’Ukraine, les sujets sur les Seconde Guerre mondiale continuent de résister en s’arcboutant cependant sur les fondamentaux de l’historiographie. Un numéro de transition en attendant le n°100…

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Présentation

L’Ukraine, terrain d’expérimentation des matériels de la Guerre froide

L’invasion de l’Ukraine provoquée par la Russie en 2022, davantage que ses opérations en 2014, déchaîne un conflit interétatique frontal qui ramène la guerre “classique” sur les terres européennes. Fantassins, artilleurs, équipages de chars, hommes du génies et de toutes les armes se retrouvent plonger dans l’enfer d’une guerre multi-dimensionnelle où les drones sur terre, sur mer et dans les airs menacent des matériels bien plus classiques.

Il n’empêche qu’entre missiles et drones, des armements plus conventionnels interviennent, s’opposent, de détruisent, s’usent… Parmi ceux-ci, et dans les deux camps, les systèmes d’armes conçus principalement dans la Guerre froide, justement pour un conflit d’ampleur, peuvent prouver, ou pas, le bienfondé des postulats qui ont présidé à leur conception.

Grande particularité, et étrangeté, de cette guerre, les armements du Pacte de Varsovie s’affrontent dans une espèce de combat fratricide et doivent désormais composer, pour les Ukrainiens, avec des matériels occidentaux dont la logique de conception diffère.

Ce conflit et les tensions internationales qui s’accumulent entrainent une nouvelle course à l’armement avec pléthore de projets. Outre les drones, l’intelligence artificielle pointe également le bout de son nez. Si le retour de la guerre en Europe semble avoir quelque peu entravé les souhaits de diversifier la ligne éditoriale pour sortir du champ exclusif des matériels roulants terrestres (voir les n°90 et 91, la question des nouvelles armes reste encore peu traitée tout comme celle de la logistique, des transmissions, et bien d’autres encore). Une piste d’amélioration à ne pas abandonner tout comme un retour aux voilures tournantes qui serait bienvenue. En tout cas, voilà de quoi remplir les brèves d’actualités sans recourir à la duplication de billets déjà en ligne. Les courts articles de Laurent TIRONE, Dominique RENAUD, Marc CHASSILLAN et Jacques ARMAND sont donc bien appréciables d’autant qu’ils servent d’apéritif à un menu beaucoup plus costaud un peu plus loin dans le magazine.

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Ukraine toujours, en plus analytique !

Alors que Trucks & Tanks Magazine hors-série n°41 forme davantage un inventaire des matériels employés en Ukraine par les deux belligérants, dans la foulée du concept né dans le numéro précédent, ce numéro décortique cinq systèmes d’armes et armements (sous-munitions, TOS-1A, Iskander, 2S19 MSTA-S et 2S22 Bohdana).

A chaque fois, le plus intéressant réside dans le comparatif entre leur genèse et leur emploi sur le terrain. Confrontés à des conditions non prévues, à l’usure des matériels, aux carences de certaines armes et munitions après de longs mois de guerre, les belligérants se voient parfois obligés de les utiliser dans des conditions qui ne sont pas optimales.

L’article sur l’Iskander donne l’occasion à Pierre GRASSER de souligner que le repositionnement de plusieurs unités qui en sont équipées à l’Ouest de la Russie fournissait un signal faible quant aux intentions russes à venir.

L’histoire du 2S22 Bohdana ukrainien rappelle également qu’en cas de conflit sur son sol, un pays doit prendre quelques mesures d’urgence en fonction de la disponibilité des pièces et de l’état de ses installations industrielles. Un sujet souvent, évoqué généralement avec les improvisations matérielles allemandes durant la Seconde Guerre mondiale qui souffrent de pénurie de matières et des bombardements sur leurs usines, qui retrouve une certaine actualité. Comme celle de faire des choix en fonction des stocks de munitions.

Bref, l’Ukraine rappelle incidemment leur rôle structurant dans les opérations de la disponibilité des matériels qui peuvent se retrouver engagés dans des conditions très loin d’être idéales.

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Près d’un an de combat entre Alliés occidentaux et Allemands à l’Ouest en 1944/1945

Dans un (très) long article, Laurent TIRONE se propose de tordre quelque peu le cou à la légende que les Allemands n’ont pas vraiment combattu les Alliés occidentaux dans les derniers mois de la Seconde Guerre mondiale en Europe “selon l’historiographie moderne”. Cette vision étonnante, un peu exagérée, annoncée en début d’article, et il faut aller plus loin dans l’article pour comprendre ce que l’auteur veut dire. Par exemple, cette légende de photo en page 30 qui précise “ces carcasses de Panther et de Sherman prouvent l’intensité des combats menés sur le front de l’Ouest, en dépit de ce que veut bien dire la propagande soviétique qui les minimise pour mettre en exergue le courage (réel) des soldats de l’Armée rouge”.

Partant de l’issue heureuse de la bataille de Normandie obtenue avec le succès de l’opération Cobra après plusieurs semaines de combat d’attrition qui tordent d’ailleurs le cou au fait de pense que les responsables allemands sur le terrain ne cherchaient pas à vaincre, l’auteur brosse un vaste panorama jusqu’à la fin de la poche de la Ruhr.

De quoi rappeler que les Allemands ne baissent pas les bras et que la défaite des Alliés occidentaux revêt un enjeu stratégique a priori plus facile à espérer que celui de se concentrer d’abord face à l’Armée rouge.

Tout au long de second semestre 1944, les Allemands essayent de privilégier les combats à l’Ouest. C’est particulièrement vrai face au Débarquement allié (voir également les travaux de Benoît RONDEAU parus dans Batailles n°95 ou ceux de Steven ZALOGA dans Allied Tanks in Normandy 1944). C’est également le cas à l’automne où ils tentent de juguler l’avance alliée, et surtout dans les Ardennes pour l’opération Wacht am Rhein. Loin de privilégier le combat contre le seul ennemi soviétique, l’armée du Troisième Reich permet à l’URSS de consolider et d’amplifier ses gains territoriaux acquis avec le pacte germano-soviétique en mettant Américains et Britanniques retardés dans leur avance devant le fait accompli (voir l’article Et si Berlin était tombé en février 1945 ? d’Yves BUFFETAUT dans Batailles n°91).

La longue lutte menée à l’Ouest ne doit cependant pas minimiser l’intensité et le gouffre de moyens que demandent les combats face à l’Armée rouge. L’effondrement du glacis péniblement reconstitué, mais à l’économie, en Pologne et en Hongrie durant l’opération Vistule-Oder oblige cependant la Wehrmacht à flécher ses maigres réserves et production vers la menace qui se rapproche d’un coup de Berlin.

A noter que l’article propose notamment trois encarts revenant sur les duels entre Heavy Tank T26E3 Pershing et Panzer VI Ausf. E Tiger puis entre le Super Pershing et le Panzer VI Ausf. B Königstiger, ainsi que sur la fin des Jagdtiger de la schwere Panzerjäger-Abteilung 512. a la place, une infographie sur les moyens matériels engagés à l’Ouest et à l’Est aurait été plus pertinente, ne serait-ce que pour mettre en avant les priorités faites par les Allemands de chercher la décision contre les Alliés occidentaux dès avant le Débarquement et jusqu’au déclenchement de l’opération Vistule-Oder, sans pour autant délaisser totalement les combats contre l’Armée rouge, loin s’en faut, mais en jouant sur une plus grande profondeur stratégique qui finit cependant par se réduire comme peau de chagrin.

Si cet article (et les autres consacrés à la Seconde Guerre mondiale) n’apportent pas grand chose aux habitués des publications des Editions Caraktère, il a moins le mérite de ne pas sombrer dans les tentatives de réécriture de l’histoire sous l’influence des actuelles visions russes (mais aussi chinoises) qui utilisent la Seconde Guerre mondiale pour justifier leurs actions géopolitiques actuelles, quitte à revenir aux fondamentaux de la propagande soviétique. Sans pour autant minimiser l’importance des Soviétiques dans la destruction du Troisième Reich. Un juste équilibre.

Conclusion

Bien davantage que Ligne de Front ou Batailles & Blindés, Trucks & Tanks Magazine “tire bénéfice” du conflit en Ukraine pour équilibrer sa ligne éditoriale, en faisant cependant le grand écart entre Seconde Guerre mondiale (qui outre les sujets mentionnés plus haut abordent également les défenses statiques équipées de tourelles de Panther, le M10 Achilles – utile complément à Tank Destroyer Achilles and M10, British Army Anti-Tanks Units, Western Europe 1944-1945 – et les SdKfz 231) et l’époque actuelle.

Si la redondance des sujets portant sur les monstres et autres projets de papier germaniques peut parfois lasser les plus anciens lecteurs, force est de constater que clôturer une centaine de numéros sur un sujet relativement de niche montre à la fois la qualité du magazine et de son équipe éditoriale sur la durée. Un succès lié également à la grande diversité de ses auteurs qui apportent leur contribution. L’un des panels les plus larges de tous les magazines des Editions Caraktère et bien plus profond que de nombreuses revues spécialisées !

Il ne faut pas oublier tout le dynamisme apporté par cette revue lors de son lancement en marchant dans les pas de Batailles & Blindés. Le défi est désormais de se renouveler et d’affronter le temps qui passe pour agréger anciens passionnés, nouveaux lecteurs… et une actualité malheureusement bien riche qui remet au premier plan chars, canons, mines, etc.

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Sommaire

Caractéristiques

  • Nombre de pages : 82
  • Langue : Français
  • Couverture : souple
  • Reliure : agrafée
  • Dimensions : 21 x 29,7 cm
  • Prix conseillé France à la date de parution : 7,80 € TTC

Historique de la page

  • Dernière mise à jour : 29/10/2023
  • Création : 21/10/2023

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