GBM n°146 (Histoire & Collections, 2023)

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Pour son dernier numéro de l’année 2023, GBM rend un très émouvant hommage à Henri de WAILLY, l’un des pionniers du récit historique des combats de 1940 au-delà des mythes édifiés par les contemporains pendant (la France de Vichy) ou après le conflit (De GAULLE et les communistes). Son texte est d’autant plus poignant qu’il l’écrit alors qu’il sait que sa fin est désormais proche, « son excellent moteur ayant épuisé son potentiel »… Cette volonté de rechercher la vérité et de la faire prospérer illustre parfaitement la mission que se donne depuis la formule mise en place après le rachat d’Histoire de Guerre par Histoire & Collections autour de François VAUVILLIER…

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Présentation

Mobilité et motorisation, les deux mamelles de GBM

Structuré comme d’habitude, ce numéro ouvre un nouveau chapitre de la mobilité des armées avant leur motorisation avec l’équipement associé aux aérostats militaires. Certains vecteurs peuvent apporter un avantage décisif, ou non négligeable, même pour une période relativement courte. Le ballon captif, tout aussi désuet en apparence à nos yeux contemporains, nécessitent cependant un environnement spécifique pour donner toute sa valeur. Une vraie logique de système avant l’heure qui comprend ses différents fourgons et ses voitures pour transporter tout le matériel nécessaire à son emploi.

Si les chevaux apportent encore la puissance motrice, très vite le moteur vient démultiplier les capacités de transport en termes de charge, de mobilité et de rapidité, sans parler de l’apparition possible de nouvelles armes que sont les chars, les automoteurs d’artillerie, l’avion, etc.

Plus que tout autre magazine, GBM explique particulièrement bien numéro après numéro cette métamorphose des armées qui s’étale de la guerre de 1870 à à la fin de la Seconde Guerre mondiale où le moteur est désormais partout et plus uniquement à explosion.

Ce que résume admirablement bien Guy FRANCOIS dans l’interview qu’il consacre au magazine à l’occasion de la parution de son livre L’artillerie automobile française des origines à 1919.

N’oublions pas que la Grande Guerre est caractérisée par le formidable essor du machinisme sous toutes ses formes, des engins terrestres et aériens jusqu’au turbines à vapeur des grands navires de combat. Ces techniques, encore balbutiantes e 1914, atteignent en 1918 un degré de modernité étonnant et ont totalement bouleversé la tactique et la stratégie militaires.

Guy FRANCOIS, Entretien, page 12.

L’angle mort de l’Entre-deux-guerres

Les publications touchant à l’histoire militaire s’intéressent généralement peu aux périodes sans combat. Ce n’est pas pour autant qu’il suffit d’une bataille pour l’attention des auteurs et des lecteurs, puisque nombre de conflits et d’affrontements restent dans l’ombre alors que quelques blockbusters éditoriaux ne cessent d’être ressassés sans rien apporter de neuf du tout.

Deux pages attirent l’attention dans ce numéro. Elles concernent la relocalisation du 1er GAM sur Troyes en octobre 1938. Outre l’occasion de sortir de l’oubli des clichés rares et de montrer des matériels français aux mains des soldats tricolores et non transformés en carcasses et trophées pour les vainqueurs de 1940, les armées restent loin d’être figées en temps paix malgré la légende de l’immobilité. Il en est de même avec l’Allemagne où à force de se focaliser sur le réarmement allemand après l’arrivée au pouvoir d’Adolf HITLER on oublie que la Reichswehr fut dès ses débuts axés sur cet objectif (voir par exemple l’article de Charles TRANG dans 39/45 Magazine381 ou les travaux de Hugues WENKIN sur les prémices de la Panzerwaffe dans 39/45 Magazine hors-série Historica103).

Pour l’armée française, l’étude approfondie de cette période de 1919 à 1939 et surtout sa valorisation permettrait de sortir des légendes nées de la défaite de 1940 mais surtout des mythes fondateurs de l’épopée gaullienne et de la réhabilitation communiste dont on perçoit encore de nos jours le poids sur l’actualité politique française et sur ses approches diplomatiques. Une véritable œuvre de salubrité publique au même titre que tout le travail effectué pour dépoussiérer l’image des combats de 1940 et l’inanité de l’armée française et de ses décideurs à cette époque.

Le retour de la collection Vauvillier ?

L’article consacré au Latil TAR semble annoncé également le prochain ouvrage de la collection Vauvillier qui devrait être le cinquième de la série.

Ces livres, tout comme la collection des grands albums, ont l’immense mérite de redonner leurs lettres de noblesse au dynamisme technologique et industriel français de la première moitié du XXème siècle.

Flavion ou la drame de la bataille mal conduite

Dans les nombreuses occasions perdues de 1940, la bataille de Flavion représente un cas d’école. Alors qu’à Gembloux, le Corps de Cavalerie conserve sa cohésion face aux 3. Panzer-Division et 4. Panzer-Division, la 1ère Division Cuirassée (DCR) se fait laminer par les 5. Panzer-Division et 7. Panzer-Division. Le matériel français blindé n’est pas en cause, ses chars sont plutôt bien plus puissants et protégés que ceux de son adversaire. La combativité des hommes n’est pas non plus la cause de ce désastre.

Pourtant, en deux jours à peine disparait sur le champ de bataille l’une des plus puissantes unités françaises.

Le récit de l’engagement du 28ème Bataillon de Chars de Combat (BCC) vaut le détour. Intrinsèquement, les chars B1 bis tiennent la dragée haute à leurs adversaires. Sauf que pénalisés par le manque de carburant ils se retrouvent incapables de manœuvrer à l’inverse de leurs adversaires qui malgré les pertes parviennent à les mettre hors d’usage un par un.

La résistance français permet de tenir une journée supplémentaire, un délai qui malheureusement ne sera pas suffisamment exploité. Mais assurément un intérêt tactique bien plus important que la charge inutile de Montcornet qui reste pourtant dans l’imaginaire collectif comme la bataille qui aurait pu tout changer grâce au travail de la mythologie gaullienne et à ses relais. Dans l’historiographie, cette bataille est rarement présentée à l’avantage des Français dont on souligne généralement uniquement la déconfiture. Imaginons quelques instants que des Tiger remplacent les B1 Bis, un bataillon de chars lourds de la Waffen-SS se substitue à la désignation du 28ème BCC et que les assaillants ne soient pas allemands mais soviétiques… Ne verrait-on pas fleurir moultes articles et couvertures analysant la résistance héroïques des défaits et supputant sur les possibilités de retourner la situation pour finalement vaincre ? Toute référence à Koursk étant bien évidemment fortuite.

Conclusion

GBM produit encore un excellent numéro, passionnant et original de bout en bout. On apprécie la fidélité de l’équipe éditoriale de rendre hommage à chaque ancien de cette recherche historique parfois à contre-courant qui permet enfin aujourd’hui de capitaliser sur des travaux sérieux à condition de ne pas retomber par paresse éditoriale dans les anciennes légendes.

C’est aussi l’occasion de se souvenir et de remercier en son for intérieur les pionniers aujourd’hui disparus à l’instar de Roger BRUGE, Pascal DANJOU et bien d’autres encore, sans oublier tous ceux qui sont encore présents et les plus jeunes qui reprennent le flambeau transmis par leurs aînés.

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Voir aussi…

Sommaire

  • Le manifeste français
  • Henri de WAILLY, In Memoriam : texte d’adieu peu de temps avant son décès écrit par Henri de WAILLY, célèbre pour ses travaux concernant la bataille d’Abbeville retraçant le parcours et rappelant l’objet de France 40 (4 pages)
  • Guy François, Entretien, l’artillerie automobile 1914-1918 : entretien avec l’auteur de l’Artillerie automobile française des origines à 1919 présentant son ouvrage, les raisons de son intérêt pour le sujet et le paradoxe de l’essor de la motorisation dans une guerre statique (1 page)
  • Didier LANCERAUX, Octobre 1938, le 1er GAM s’installe à Troyes : reproduction d’un texte d’époque sur l’installation à Troyes d’une composante de la 15ème Division d’Infanterie Motorisée (DIM) (2 pages)
  • Pages choisies au fils des éditeurs (1940, les raisons d’un échec, 17 juin 1940, la France choisit de continuer la lutte, L’artillerie automobile française des origines à 1919, L’or des Belges tome 2, La région de Florennes au début de la Seconde Guerre mondiale 1940-1941)
  • Jean-Claude LATOUR, Les voitures de l’aérostation militaire (1ère partie) : organisation et véhicules de servitude de l’aérostation militaire française (7 pages)
  • Guy FRANCOIS, Le 120 L Modèle 1878 et la traction automobile : transformation de l’attelage du canon de 120 mm L Modèle 1878 pour le rendre compatible avec la traction par des véhicules de servitude (6 pages)
  • Régis POTIE, L’escadron AMD du 1er RAM : combats dans les Ardennes et couverture de Dinant par l’escadron d’AMD 178 Panhard du 1er RAM de la 1ère Division Légère de Cavalerie (DLC) ( (9 pages)
  • François VAUVILLIER, Les Latil TAR à radiateur en avant (1ère partie) : description de la gamme des Latil TAR (6 pages)
  • Stéphane BONNAUD, Le 28e BCC au combat (2ème partie) : combats du 28ème Bataillon de Chars de Combat (BCC) équipé de chars B1 Bis de la 1ère Division Cuirassée (DCR) à Flavion face aux 5. Panzer-Division et 7. Panzer-Division puis description du repli des éléments restants (28 pages)
  • Nicolas PALMIER, La 60e BACA, dernière pleinement constituée : historique de la 60ème Batterie Antichars Automotrice (BACA) équipée de Laffly W15 TCC qui combat en Île-de-France en juin 1940 (5 pages)

Caractéristiques

  • Nombre de pages : 82
  • Langue : Français
  • Couverture : souple
  • Reliure : collée
  • Dimensions : 21 x 29,7 cm
  • Prix conseillé France à la date de parution : 12,50 € TTC

Historique de la page

  • Dernière mise à jour : 21/10/2023
  • Création : 29/09/2023

2 réflexions sur « GBM n°146 (Histoire & Collections, 2023) »

  1. Excellente idée de mettre ainsi GBM en valeur. Ce magazine est vraiment unique en son genre, autant dans sa démarche que dans sa rigueur et dans la qualité de sa réalisation. Véritablement une oeuvre d’utilité publique.

    1. Absolument, l’une des meilleures revues sur la période 1914/1940, d’une constance absolue tant sur le fond que sur la forme. Couvrir l’espace 1871/1918 aide également à comprendre les mutations rapides qui s’imposent aux armées avec l’impulsion du moteur ainsi que ses conséquences sur les matériels et les doctrines d’emploi.

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