1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)

Historia Paris Normandie HS 002 1944 ete sanglant 30 villes normandes sous les bombes.pngPublié à l’occasion des célébrations du 75ème anniversaire du Débarquement allié, ce numéro spécial d’une centaine de pages revient sur l’une des polémiques qui entachent de façon récurrente la victoire alliée en Normandie, à savoir les pertes civiles et les destructions patrimoniales occasionnées en vue et au cours de l’opération Overlord.

Comme le souligne immédiatement une infographie dès la première page, ce sont vingt mille civils qui sont tués. Les trois-quart d’entre eux se trouvent au Havre, à Rouen et à Evreux. Pertes inutiles ?

Pas sûr. Car, avec raison, les auteurs précisent qu’il faut analyser la campagne de bombardement avec le regard de l’époque et non avec la connaissance des résultats de combats après-coup. L’opération Overlord est un enjeu majeur pour les belligérants. Le risque est énorme pour les Alliés. Tout échec serait une catastrophe. Donc, tout doit être mis en oeuvre pour réussir. Le choix de la Normandie, au-delà du fait d’être moins défendue que le Pas-de-Calais, est aussi lié au fait de pouvoir facilement isoler le champ de bataille grâce à la Seine d’un côté et la Loire de l’autre. La carte schématique en appui de la présentation du Transportation Plan est explicite. Dans sa conception, celui-ci est remarquablement moderne puisque conçu en fonction de l’effet recherché (« Effects-Based » au lieu de « Targets-Based »).

Il n’empêche que les Américains sont sans états d’âme. Cette culture est d’ailleurs toujours très présente (Vietnam dans les années 70, Irak et Afghanistan au début du XXIème siècle en sont des exemples). Elle est liée à l’histoire du pays qui n’a pas connu de destructions massives sur son propre territoire. Mais les risques à long terme sont réels en termes d’image. Dans un guerre totale telle que la Seconde Guerre mondiale, ils sont négligeables. Dans le cas de conflits asymétriques, ils sont rédhibitoires.

Si les bombardements peuvent militairement se justifier, certains sont néanmoins plus litigieux comme celui du Havre avant sa libération.

Autre intérêt de cette publication, le rappel que les bombardements de l’époque ne sont pas aussi chirurgicaux qu’au XXIème siècle. Pour espérer détruire un pont, il en faut quelques tonnes de bombes. Idem pour rendre hors d’usage un centre ferroviaire. Deux logiques s’affrontent donc. D’un côté, les populations sont réticentes à quitter leurs habitations – encore leur faut-il trouver un point de chute. De l’autre, il n’est techniquement pas possible de faire autrement et militairement il est hors de question de laisser à l’ennemi la possibilité de faire acheminer rapidement ses renforts.

Les plus petites agglomérations souffrent aussi. Sont évoqués, mais très rapidement, les conséquences directes des combats qui tuent aussi des civils (voir Montebourg se souvient par exemple).

Les textes sont ponctués de témoignages poignants de civils ayant dû affronter l’enfer et l’horreur.

Très intéressants sont les passages consacrés à l’après-combat et à l’après-guerre. D’une part, le danger ne cesse pas du jour au lendemain en raison de la présence des mines et de nombreux explosifs qui traînent. D’autre par, au-delà des morts et des blessés, de milliers de personnes se retrouvent sans toit et sans rien. L’enjeu de la reconstruction est par conséquent énorme. Des décennies plus tard, il est facile de critiquer les choix architecturaux faits à l’époque. C’est encore oublier le contexte de l’époque. La pression est énorme et les moyens imités en comparaison des nécessités.

Les lignes de fracture de la politique française sont encore très liées à la défaite de 1940 et à la position des différentes sensibilités tricolores au cours de la guerre. Mais l’impact est aussi économique et social, du fait des options retenues à la reconstruction sur une partie non négligeable du territoire.

Sommaire :

  • Edito
  • Frédéric GUELTON, Bombarder une population amie, le dilemme, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Frédéric GUELTON, Zuckerman, le stratège, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Frédéric GUELTON, Churchill-Roosevelt, le bras de fer, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Agathe POIROT-BOURDAIN, Rouen, la semaine rouge, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Agathe POIROT-BOURDAIN, Le Havre… lunaire, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Agathe POIROT-BOURDAIN, Lisieux, l’état de siège, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Agathe POIROT-BOURDAIN, Saint-Lô, ville fantôle, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Agathe POIROT-BOURDAIN, Caen, le premier jour du reste de leur vie, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Jacques TANGUY, Pays de Caux, la bataille des V1, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Guillaume MALAURIE, Dieppe la miraculée, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Patrick FISSOT, Manche-Calvados, 11 000 victimes civiles, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Gérard BOURDIN, L’Orne, terre d’exode, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Guy PESSIOT, Eure, le feu, le sang… la joie, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Marcel SELLIER, Pays de Brain, « j’étais un gamin inconscient du danger », in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Hugues DEMEUDE, Attention, terrain miné !, in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • Patrick GOURBIN, Architecture d’après-guerre, « le regard change », in 1944, l’été sanglant : 30 villes normandes sous les bombes (Historia / Paris Normandie, 2019)
  • A découvrir (le Mémorial de Falaise, livres)

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