La batterie d’Azeville est une batterie d’artillerie côtière construite pour protéger la façade Est du Cotentin en Normandie par les Allemands au cours de la Seconde Guerre mondiale dans le cadre du Mur de l’Atlantique (Atlantikwall). Elle est mise en oeuvre par le Heeres-Küsten-Artillerie-Regiment (HKAR) 1261.
La batterie comprend quatre pièces d’origine française 10,5 cm Kanone 331(f) sous bunker de type H650 qui peuvent être également déplacées sur les six encuvements qui permettent de tirer à 360°. Le site est complété par plusieurs autres ouvrages bétonnés de servitude (deux abris pour personnels de type Vf2a, un abri de type R621, d’une soute à munitions de type Vf7b, de trois Tobruk de type 58c. La défense antiaérienne est assurée par deux pièces de 3,7cm Flak 36 positionnée sur deux des casemates.
Située à 4,6 kilomètres de la côte, la batterie n’a cependant pas de vue directe sur la mer. Si cela lui permet d’éviter des tirs directs en provenance d’éventuels navires ennemis, cela nécessite aussi de disposer d’un poste d’observation déporté afin de guider ses tirs. Celui-ci se situe à 2,8 kilomètres de la mer, soit à près de deux kilomètres de la batterie au sein de la position de la batterie de Saint-Marcouf Crisbecq, une ligne téléphonique enterrée reliant les deux positions.
La batterie intervient contre le Débarquement allié du 6 juin 1944 contre les forces américaines à Utah Beach. Elle est cependant en limite de portée [cf. Plan de feu des de la Seine ouest dans 39/45 Magazine n°11 (Heimdal, 1986), p.79] pour atteindre la plage sur laquelle les Américains débarquent et font transiter ravitaillement et renforts. La batterie d’Azeville résiste trois jours complets à l’avance de la 4th US Infantry Division avant de capituler.
Chronologie :
Février 1942 : Une première batterie installée à proximité de la côte est atteinte par un violent raz-de-marée et la décision est prise de construire une position fortifiée à l’intérieur des terres.
Avril 1942 : Début des travaux sur Azeville.
Février 1944 : Devant le risque des bombardements alliés, les pièces d’artillerie sont installées dans les casemates.
6 juin 1944 : Débarquement allié en Normandie. A 1h30, les batteries d’Azeville et de Saint-Marcouf sont bombardées par les Alliés. Celle d’Azeville est épargnée par les bombes tandis que celle de Saint-Marcouf est écrasée. Plusieurs civils sont tués dans leurs maisons. Dans la nuit, la batterie est attaquée par des parachutistes de la 101st US Airborne Division Screaming Eagles qui ont été largués en-dehors de leur zone de saut, mais ces derniers sont facilement repoussés, un lieutenant est notamment capturé. Au petit matin, la batterie ouvre le feu sur la flotte alliée. Pour protéger l’assaut de la 4th US Infantry Division sur Utah Beach, l’USS Nevada ouvre le feu sur la batterie d’Azeville et place plusieurs coups au but. Les Américains débarquent 1,8 kilomètre plus au Sud de ce qui était prévu et sont donc plus éloignés des batteries de Saint-Marcouf et d’Azeville. Celles-ci ne sont cependant pas en mesure de s’opposer véritablement au débarquement. Malgré tout, celles-ci sont encore en état de tirer sur Utah Beach en fin de journée et n’ont pas été conquises, contrairement à celle de Saint-Martin-de-Varreville.
7 juin 1944 : La 4th US Infantry Division tente de s’emparer de la batterie d’Azeville avec l’appui de blindés, mais l’attaque est finalement repoussée. La batterie parvient encore à tirer sur les plages de débarquement mais doit également subir des tirs du BB-36 USS Nevada.
8 juin 1944 : Au matin, le village d’Azeville est globalement aux mains des Américains, mais la batterie résiste toujours malgré les attaques américaines supportées par des M4 Medium Tank Sherman. La batterie d’Azeville ouvre le feu sur son poste d’observation pour chasser les Américains qui s’y infiltrent. Elle tire aussi sur la batterie de Saint-Marcouf pour les mêmes raisons. Dans la nuit qui suit, le BB-36 USS Nevada place de nouveaux coups au but sur la batterie.
9 juin 1944 : La 4th US Infantry Division finit par s’emparer de la batterie d’Azeville contrainte de capituler après avoir été attaquée au lance-flammes et déplorant d’importantes pertes depuis le début des combats le 6 juin. Le lieutenant parachutiste américain capturé le 6 juin fait office d’intermédiaire.
10 juin 1944 : La batterie de Saint-Marcouf tient toujours.
11 juin 1944 : Les rescapés de la batterie de Saint-Marcouf reçoivent l’ordre de décrocher dans la nuit.
12 juin 1944 : Les rescapés de la batterie de Saint-Marcouf rejoignent les lignes allemandes plus au Nord dans le Cotentin. Les Américains de la 4th US Infantry Division s’emparent donc sans combat de la batterie, six jours après le Débarquement…
Bibliographie
- Association historique et culturelle de Montebourg et de son canton, Montebourg se souvient, 6 juin – 19 juin 1944 [à compte d’auteur, 1994]
- Georges BERNAGE, Première victoire américaine en Normandie [Heimdal, 1990]
- Georges BERNAGE & Dominique FRANCOIS, Utah Beach, Sainte-Mère-Eglise, Sainte-Marie-du-Mont [Heimdal, 2004]
- Alain CHAZETTE, Les batteries de côte en Normandie, du Havre à Cherbourg [Histoire et Fortifications, 2011]
- Alain CHAZETTE, Le Mur de l’Atlantique en Normandie [Heimdal, 2000]
- Alain CHAZETTE, Alain DESTOUCHES, Bernard PAICH, Atlantikwall, le Mur de l’Atlantique en France [Heimdal, 1995]
- Helmut Konrad von KEUSGEN, Les canons de Saint-Marcouf, les batteries d’Azeville et de Crisbecq face à Utah Beach [Heimdal, 2005]
- Claude QUETEL (sous la direction de ), Dictionnaire du Débarquement [Ouest-France, 2011]
- Christophe PRIME, Utah Beach, mardi 6 juin 1944 [OREP, 2019]
- Valentin SCHNEIDER, Une garnison en Normandie, la batterie allemande d’Azeville [OREP, 2014]
Magazines et périodiques
- Yves BUFFETAUT, De Sainte-Mère-Eglise à Montebourg, 8 au 14 juin 1944, [Batailles n°23 (Histoire & Collections, 2007)]
- Alain CHAZETTE & Alain DESTOUCHES, Le Mur de l’Atlantique en Normandie [39/45 Magazine n°11 (Heimdal, 1986)]
- Stéphane JACQUET, 6-25 juin 1944, le bombardement naval dans le secteur américain (1ère partie) [Normandie 1944 Magazine n°35 (Heimdal, 2020)]