Historique
L’opération Wintergewitter (tempête d’hiver) est la seule tentative allemande pour tenter de dégager la 6. Armee qui s’est retrouvée encerclée dans la poche de Stalingrad suite à l’opération Uranus menée avec succès par les Soviétiques. Elle démarre le 12 décembre 1942. Malgré des succès initiaux, elle est définitivement stoppée le 24 décembre 1942 sans avoir atteint son objectif.
Le 19 novembre 1942, l’Armée Rouge déclenche l’opération Uranus qui consiste à prendre en tenaille la 6. Armee engluée dans des combats de rue sans fin à Stalingrad au bord de la Volga. La pince Nord pulvérise la 3ème Armée roumaine sur le Don, la pince Sud fait de même sur la 4ème Armée roumaine. Le 23 novembre 1942, les deux pinces se rejoignent, la 6. Armee est encerclée. Alors qu’un repli est encore possible, Adolf HITLER ordonne le 24 novembre 1942 de tenir les positions et de se former en hérisson. Il refuse également tout plan visant à évacuer le Caucase après avoir rétabli le lien avec la 6. Armee et le retour sur les positions de départ de l’opération Fall Blau. Il ne reste donc qu’à ravitailler grâce à un pont aérien inédit les troupes encerclées et à organiser une opération de dégagement.
A cet effet, la création du Heeresgruppe Don est décidée le 21 novembre 1942 pour prendre en compte la 6. Armee, les restes des deux armées roumaines mises à mal par l’offensive soviétique, l’Armee-Abteilung Hollidt et des éléments de la 4. Panzer-Armee. Le commandement de ce nouveau groupe d’armées est confié à Erich von MANSTEIN dont l’état-major est effectivement opérationnel le 27 novembre 1942.
L’opération de dégagement de Stalingrad prend le nom de code Wintergewitter (tempête d’hiver). Pour percer l’étau qui s’est établi autour de la 6. Armee, il est prévu trois axes d’attaque :
- Le principal, mais le plus éloigné, est articulé autour du LVII. Panzer-Korps qui doit parcourir 150 kilomètres mais devant qui les défenses soviétiques sont plus faibles
- Le second est situé sur la Tchir à une cinquantaine de kilomètres seulement des premières lignes de la 6. Armee, mais doit faire face à une densité importante d’unités soviétiques
- Le troisième est une attaque du XIV. Panzer-Korps de la 6. Armee quand les unités de dégagement seront suffisamment proches de la poche (opération Donnerschlag)
19 novembre 1942 : Déclenchement de l’opération Uranus visant à encercler la 6. Armee engluée à Stalingrad.
21 novembre 1942 : L’Oberkommando des Heeres (OKH) ordonne à la 6. Armee de se maintenir à Stalingrad et sur la Volga, lui enlevant de fait tout possibilité de manœuvre et de redéploiement de ses forces pour faire face à l’offensive soviétique. Erich von MANSTEIN reçoit l’ordre de dissoudre sa 11. Armee pour constituer avec son état-major le Heeresgruppe Don chargé de boucher le trou qui s’est formé dans le front allemand suite aux premiers succès de l’opération Uranus.
23 novembre 1942 : Les deux pinces soviétiques font leur jonction, la 6. Armee est encerclée.
24 novembre 1942 : Adolf HITLER ordonne à la 6. Armee de s’établir en hérisson en attendant les secours.
27 novembre 1942 : Erich von MANSTEIN prend de façon effective le commandement du Heeresgruppe Don.
28 novembre 1942 : Arrivée de la 6. Panzer-Division rappelée d’urgence de France et de la 23. Panzer-Division en provenance du Caucase.
7 décembre 1942 : La 5ème Armée soviétique de Chars s’élance à travers la Tchir et menace la 336. Infanterie-Division qui vient d’arriver. La 11. Panzer-Division prévue pour participer à l’opération Wintergewitter est détournée pour contrer la menace.
8 décembre 1942 : La Stavka ordonne la création de la 5ème Armée soviétique de Choc entre la 5ème Armée soviétique de Chars et la 51ème Armée soviétique pour à la fois détruire les forces allemandes positionnées dans le secteur de Nizhniy Chir (à la confluence du Tchir et du Don) et empêcher toute tentative allemande de rétablir la liaison avec la 6. Armee à partir de ce secteur qui est le plus proche du chaudron.
9 décembre 1942 : La 5ème Armée soviétique de Chars lance son 5ème Corps Mécanisé soviétique à travers le Tchir dans le secteur de Sourovikino, mais les lignes allemandes composées d’éléments éparses rassemblés en urgence tiennent bon. Pendant ce temps, la 11. Panzer-Division avec des éléments de la 336. Infanterie-Division termine de nettoyer le secteur du Kolkhoze 79.
10 décembre 1942 : La 11. Panzer-Division est à nouveau engagée pour contrer la menace soviétique et épauler la 336. Infanterie-Division qui subit à nouveau les assauts de la 5ème Armée soviétique de Chars à partir de la tête de pont établie sur le Tchir à Ostrovskoy. Dans le secteur de Sourovikino, les Soviétiques s’emparent de quelques points fortifiés allemands par un coup de main nocturne.
11 décembre 1942 : Arrivée de la 17. Panzer-Division en provenance du Heeresgruppe Mitte. Sur le Tchir, dans le secteur de Lissinski,, la 5ème Armée soviétique de Chars menace à nouveau les lignes de la 336. Infanterie-Division qui appelle à nouveau la 11. Panzer-Division à la rescousse alors qu’elle doit rejoindre ses positions de départ pour son offensive en direction de la 6. Armee encerclée.
12 décembre 1942 : Déclenchement de l’opération Wintergewitter. Le LVII. Panzer-Korps s’élance face à la 51ème Armée soviétique. Compte tenu des bons débuts de l’attaque, il est décidé que la 17. Panzer-Division soit orientée sur cet axe plutôt qu’à partir du Tchir.
14 décembre 1942 : La 6. Panzer-Division est temporairement arrêtée par les contre-attaques de l’Armée Rouge.
15 décembre 1942 : Arrivée des premiers éléments de la 7. Panzer-Division rappelée de France qui sont cependant détournés pour la défense du bassin du Donetsk.
16 décembre 1942 : Début de l’opération Petite Saturne, les Soviétiques attaquent les lignes de la 8ème Armée italienne à partir de la tête de pont de Verkhniy Mamon sur le Don. Les Italiens résistent et tiennent leurs lignes.
17 décembre 1942 : La 6. Panzer-Division atteint les rives de l’Aksaï qui n’est cependant pas assez gelée en profondeur pour être traversée sans un pont. Bien plus au Nord, la défense italienne finit par s’effondrer sous les coups de boutoir soviétique.
18 décembre 1942 : Adolf HITLER refuse d’accéder à la requête d’Erich von MANSTEIN d’ordonner à la 6. Armee de percer vers le LVII. Armee-Korps.
19 décembre 1942 : Erich von MANSTEIN envoie un de ses représentants dans la poche de Stalingrad pour rencontrer Friedrich PAULUS et l’état-major de la 6. Armee afin de les convaincre, en vain, de tenter une percée. Le chef d’état-major de la 6. Armee, Arthur SCHMIDT, se montre particulièrement opposé à toute tentative de sortie. Son ascendant moral sur Friedrich PAULUS est tel qu’il le convainc de ne rien tenter. Le LVII. Panzer-Korps néanmoins poursuit son avance, la 23. Panzer-Division puis la 6. Panzer-Division atteignent la Myshkova. Afin de renforcer l’opération de dégagement de Stalingrad, Adolf HITLER ordonne à la SS-Panzergrenadier-Division Wiking de relever la 16. Infanterie-Division (mot.) pour lui permettre de remonter vers le Nord pour renforcer le LVII. Panzer-Korps.
20 décembre 1942 : Friedrich PAULUS confirme qu’il n’est pas en capacité de tenter immédiatement une sortie compte tenu de ses pertes, de la faiblesse de ses troupes, du manque de ravitaillement (carburant notamment) et du délai nécessaire (6 jours) pour se préparer.
21 décembre 1942 : Lors d’un échange direct, Erich von MANSTEIN tente de convaincre, toujours en vain, Adolf HITLER d’ordonner à la 6. Armee de percer en direction LVII. Panzer-Korps.
24 décembre 1942 : Raid du 24ème Corps soviétique de Chars sur la base aérienne de Tatsinskaya après avoir parcouru 240 kilomètres. La 306. Infanterie-Division tout juste arrivée en provenance de Belgique et la 11. Panzer-Division y sont expédiées immédiatement pour rétablir la situation. La 2ème Armée soviétique de la Garde contre-attaque le LVII. Panzer-Korps, les Allemands sont obligés de reculer.
25 décembre 1942 : Les pointes avancées du LVII. Panzer-Korps refluent à travers l’Aksaï. L’opération Wintergewitter a échoué.
Menée avec des moyens insuffisants dans des conditions climatiques particulièrement difficiles, l’opération Wintergewitter est rapidement bloquée malgré quelques premiers succès.
L’opération est hypothéquée avant même de commencer par les attaques contenues de l’Armée Rouge sur la Tchir qui empêchent le départ d’un second axe d’attaque. Le déclenchement de l’opération soviétique Petite Saturne en direction de Rostov-sur-le-Don menace l’ensemble des unités allemandes encore engagées dans le Caucase et détourne à nouveau des moyens prévus pour l’opération de dégagement de Stalingrad. Les moyens lancés par l’Armée Rouge contre les pointes du LVII. Panzer-Korps qui ne peut recevoir des renforts achèvent tout espoir de dégagement de la 6. Armee.
L’opération Wintergewitter est une chimère qui apporte aux hommes de la 6. Armee un soutien moral essentiel à leur résistance et qui entretient pour certains l’espoir qu’un ultime miracle peut se produire.
La cinquantaine de kilomètres qui sépare in fine les pointes avancées du LVII. Panzer-Korps de la 6. Armee ne peuvent être comblées. Celle-ci ne veut pas et n’a pas les moyens de tenter une sortie. Elle est donc condamnée à mourir dans des conditions dantesques sur les rives de la Volga et à tenir le plus longtemps possible pour permettre aux Allemands de sauver les unités enfoncées dans le Caucase.
La mise sur orbite réussie de “Saturne”, troisième “planète” soviétique après “Uranus” et “Mars”, dépend cependant de la capacité de l’Armée rouge à impulser à son opération une poussée initiale suffisante (…). En dépit de sa faiblesse, l’opération “Wintergewitter” est donc parvenue à contrarier les plans soviétiques.
Benoist BIHAN, La Wehrmacht, la fin d’un mythe [Perrin, 2023], page 202.
Bibliographie
Repères bibliographiques
S’il ne dit rien des combats de l’opération Wintergewitter auxquels il ne participe, Heinrich GERLACH dans son roman témoignage écrit après sa capture à Stalingrad, mais avant la fin de la guerre, Eclairs lointains, décrit très bien l’immense espoir que suscite la tentative de dégagement pour les hommes de la 6. Armee et la confiance qu’ils mettent dans Erich von MANSTEIN pour réussir.
Livres

Collectif sous la direction de Jean LOPEZ, La Wehrmacht, la fin d’un mythe [Perrin, 2023]

Heinrich GERLACH, Eclairs lointains, percée à Stalingrad [Anne Carrière, 2017]

Stéphane LAVIT & Jérôme CROYET, La 11. Panzer-Division “division fantôme” [Histoire & Collections, 2022]
Magazines et périodiques
- Mathias ANDRE, Moscou, Stalingrad, Koursk, les erreurs à l’origine des échecs allemands [Ligne de Front n°88 (Caraktère, 2020)]
- Nicolas BERNARD, Stalingrad, la mort de la 6. Armee [Batailles & Blindés hors-série n°36 (Caraktère, 2018)]
- Yves BUFFETAUT, Stalingrad (2ème partie) [39/45 Magazine n°23 (Heimdal, 1987)]
- Robin SCHÄFER, Au secours de Stalingrad ! Les carnets de Friedrich Sander Batailles & Blindés n°106 [Caraktère, 2022]