Présentation
Dans l’historiographie de la bataille de Normandie, la 15. Armee joue le rôle de l’inutile, celle qui attend vainement un second débarquement alors que la tempête s’abat sur la 7. Armee voisine. Cette image représente bien entendu une part de réalité, surtout en juin et en juillet 1944. Mais à partir de la fin août et en septembre 1944, elle participe activement aux opérations qui petit à petit permettent aux Allemands de stopper l’avancée alliée aux frontières du Troisième Reich et en Hollande. Un rôle cette fois essentiel mais largement méconnu qui apparait ici au grand jour en complément des précédents ouvrages des deux auteurs qui avaient déjà pu mettre en avant son importance dans l’échec de Market Garden (Autumn Gale, Kampfgruppe Chill, schwere Heeres-Panzerjäger-Abteilung 559 and the German recovery in the autumn of 1944 et Kampfgruppe Walther and Panzerbrigade 107, A thorn in the side of Market Garden).
L’arme au pied
Jack DIDDEN et Maarten SWARTS commencent logiquement par rappeler l’historique de cette 15. Armee qui voit le jour le 1er janvier 1941 pour aller remplacer les 9. Armee et 16. Armee destinées à participer à l’opération Barbarossa. Le transfert s’effectue d’ailleurs de façon camouflée jusqu’en juillet pour entretenir l’illusion et surtout tenter de leurrer les ennemis. Comme pour la 7. Armee, la première tâche de ces états-majors est de reconstituer un noyau de force après le prélèvement de l’essentiel des grandes unités expérimentées ainsi que des unités des soutiens pour l’invasion de l’URSS en plus de garder les frontières maritimes occidentales.
La volonté britannique de lancer des raids commandos sur le sol européen pour maintenir la pression impacte aussi la 15. Armee concernée par les opérations Biting, Bristle et Jubilee. En 1942, la 15. Armee contrôle toute la côte de la façade ouest du Cotentin à la Hollande et l’embouchure de l’Escaut. L’année 1943 correspond au renforcement de ce qui devient le Mur de l’Atlantique avec un accent prioritairement mis sur le Nord-Pas-de-Calais (voir Le Mur de l’Atlantique en images, volume 2, AOK 15). Le décor se finalise au printemps 1944 avec les derniers arbitrages qui renforcent d’ailleurs la 7. Armee et plus particulièrement le Cotentin.
Dans les jours qui suivent immédiatement le 6 juin 1944, la 15. Armee contribue activement aux efforts pour tenter de repousser les Alliés à la mer avec les 711. Infanterie-Division et 346. Infanterie-Division, notamment contre la tête de pont aéroportée britannique qu’elles échouent cependant à réduire malgré plusieurs tentatives. Les lecteurs bénéficient de la narrations de ces combats (Bois de Bavent, Troarn) et des cartes associées. A partir du 21 juin 1944, un redécoupage des zones de responsabilité permet à la 15. Armee de se dégager totalement des combats en Normandie.
Rattrapée par les combats
Si l’opération Goodwood ne provoque pas de percée, l’opération Cobra parvient à éventrer le front allemand pour lancer enfin les Alliés en direction de la Bretagne, de la Loire puis de la Seine après la clôture de la poche de Falaise/Trun/Chambois. La Heeresgruppe B sous les ordres de Günther von KLUGE sollicite à plusieurs reprises la 15. Armee pour transférer en urgence des divisions en direction de la Normandie pour tenter de colmater les brèches. Le récit des départs et des quelques renforts en compensation montre comment la Wehrmacht tente de réagir à son effondrement en Normandie.
Alors que les 7. Armee et 5. Panzer-Armee tentent d’éviter l’encerclement et de sauver ce qui peut l’être, la 15. Armee reçoit la mission de fournir les unités destinées à les recueillir et surtout de freiner les Alliés, en particulier sur la Seine. Le livre se penche donc sur les combats de Mantes-Gassicourt, Paris, Vernon, Louviers, Elbeuf. Malgré tout, les Alliés parviennent à s’établir rapidement et solidement au nord du fleuve pour lancer une poussée plein nord. En deux jours, les pointes des 11th Armoured Division et 2nd US Armored Division avancent en direction de la Somme rendant caduc le plan de repli progressif de la 15. Armee. Cette deuxième ligne potentielle d’arrêt ne peut jouer son rôle car transpercée dans la foulée à Amiens et sa région par les Alliés.
Toute l’aile gauche de la 15. Armee se retrouve en grave danger d’autant plus que la géographie n’ade pas. Quand les Alliés foncent plein nord, la côte prend plutôt une direction nors-est, laissant un espace de moins en moins grand. Le livre rend bien compte de ce tempo qui risque d’enfermer la 15. Armee. Celle-ci parvient à replier ses unités à travers la Somme.
Finalement, la seule poche que les Alliés peuvent créer se trouve être celle de Mons également bien traitée dans ce livre.
La couac d’Anvers
Comme déjà évoqué dans Autumn Gale, Kampfgruppe Chill, schwere Heeres-Panzerjäger-Abteilung 559 and the German recovery in the autumn of 1944, la prise du port d’Anvers peut représenter une nouvelle grande opportunité pour les Alliés… à condition de se lancer immédiatement à l’assaut des berges de l’Escaut.
Pendant ce temps, le gros de la 15. Armee continue de se replier vers la Belgique sans perdre sa cohésion. L’ouvrage s’achève sur la constitution de la tête de pont de Breskens et de Terneuzen et la protection de la Zélande.
Conclusion
Ce livre procure un récit haletant où le lecteur peut s’attendre à tout moment à des rebondissements et surtout à l’anéantissement de la 15. Armee. Jour après jour, les erreurs de jugement alliées empêchent de lui porter un coup décisif, permettant ainsi un repli réussi dans un contexte totalement défavorable. L’exploit allemand de septembre 1944 apprait ainsi au grand jour, même s’il n’est lui-même pas dénué de bévues. Pour s’en sortir, les unités allemandes peuvent encore s’appuyer sur une structure solide de commandement qui repose sur des généraux capables de prendre leurs responsabilités, à l’image de Gustav-Adolf von ZANGEN qui dirige la 15. Armee dans ces moments particulièrement agités.
L’immense avantage de ce livre est également de mettre en avant des combats et des unités généralement très peu ou pas du tout abordés. Les derniers chapitres proposent une analyse de ces quelques semaines intenses que résument d’ailleurs six cartes particulièrement démonstratives. La cartographie est toujours un atout pour les livres de ces deux auteurs.
Les troupes de la 15. Armee n’ont donc pas fini de faire parler d’elles, comme celles des 7. Armee et 5. Panzer-Armee qui parviennent à s’échapper de la Normandie…
Un ouvrage indispensable à tous les amateurs de cette période et plus globalement à tous ceux qui souhaitent comprendre le cycle inaliénable des décisions/actions/réactions.
Voir aussi…
Thèmes abordés
- Périodes : Seconde Guerre mondiale 1939/1945
- Fronts : Europe 1939/1945, Ouest 1940/1944, Ouest 1944/1945, Raids commandos alliés à l’Ouest 1940/1945
- Batailles : France 1944/1945, Belgique 1944/1945, Hollande 1944/1945, 6 juin 1944, Normandie 1944, Tête de pont aéroportée britannique en Normandie 1944, Dieppe 1942, Bruneval 1942, Hardelot 1942, Bois de Bavent 1944, Troarn 1944, Dives 1944, Bréville 1944, Ranville 1944, Opération Smock 1944, Opération Fortitude 1944, Seine 1944, Mantes-Gassicourt 1944, Vernon 1944, Vernonnet 1944, Louviers 1944, Elbeuf 1944, Oise 1944, Eure 1944, Beauvais 1944, Picardie 1944, Amiens 1944, Opération Supercharge II 1944, Caudebec-en-Caux 1944, Somme 1944, Gisors 1944, Le Havre 1944, Albert 1944, Abbeville 1944, Mons 1944, Opération Sabot 1944, Gand (Gent) 1944, Bruxelles 1944, Anvers (Antwerpen) 1944, Nord-Pas-de-Calais 1944, Calais 1944, Boulogne-sur-Mer 1944, Dunkerque 1944/1945, Lys (Leie) 1944, Escaut (Scheldt) 1944, Breskens 1944, Terneuzen 1944, Bruges (Brugge) 1944, Canal Léopold (Leopoldvaart) 1944, Canal Axel-Hulst (Zijkanaal) 1944, Walcheren 1944, Zélande 1944
- Unités : 15. Armee, 7. Armee, 5. Panzer-Armee, 47. Infanterie-Division, 48. Infanterie-Division, 49. Infanterie-Division, 59. Infanterie-Division, 64. Infanterie-Division, 70. Infanterie-Division, 84. Infanterie-Division, 85. Infanterie-Division, 89. Infanterie-Division, 226. Infanterie-Division, 245. Infanterie-Division, 326. Infanterie-Division, 331. Infanterie-Division, 344. Infanterie-Division, 346. Infanterie-Division, 347. Infanterie-Division, 348. Infanterie-Division, 363. Infanterie-Division, 711. Infanterie-Division, 712. Infanterie-Division, 719. Infanterie-Division, schnelle Abteilung 507, 21. Panzer-Division, 17. Luftwaffen-Feld-Division, 18. Luftwaffen-Feld-Division, 6. Fallschirmjäger-Division, 182. Reserve-Division, LXXXI. Armee-Korps, Festungs-Infanterie-Bataillon 1406, Festungs-Infanterie-Bataillon 1407, Festungs-Infanterie-Bataillon 1408, Festungs-Maschinengewehr-Bataillon 26, Festungs-Maschinengewehr-Bataillon 27, Festungs-Maschinengewehr-Bataillon 28, Marine-Einsatz-Kommando (MEK), 6th Airborne Division, 15th (Scottish) Infantry Division, 43rd (Wessex) Infantry Division, 49th (West Riding) Infantry Division, 51st (Highland) Infantry Division, 53rd (Welsh) Infantry Division, Guards Armoured Division, 7th Armoured Division, 11th Armoured Division, 2nd Canadian Infantry Division, 3rd Canadian Infantry Division, 4th Canadian Armoured Division, II Canadian Corps, XII Corps, XXX Corps, 1st Polish Armoured Division, 79th US Infantry Division, 2nd US Armored Division, 3rd US Armored Division
- Fortifications : Mur de l’Atlantique (Atlantikwall), Mur de l’Atlantique (Atlantikwall) dans le Nord-Pas-de-Calais
- Biographies : Curt HAASE, Rudolf HOFMANN, Gerd von RUNDSTEDT, Erwin ROMMEL, Walter MODEL, Hans von SALMUTH, Adolf KUNTZEN, Gustav-Adolf von ZANGEN, Heinrich EBERBACH
Sommaire détaillé
- Preface
- Introduction
- The Lull before the Storm (15 February 1944 – 5 June 1944)
- Into battle (6 – 20 June 1944)
- An Army in waiting (21 June – 25 August 1944)
- New Masters and a New Threat (25 – 28 August 1944)
- Supercharge (29 August 1944)
- Grave Danger (30 August 1944)
- Disaster on the Somme (31 August 1944)
- Into the breach (1 September 1944)
- A gold opportunity ? (2 September 1944)
- Operation Sabot (3 September 1944)
- Antwerpt, the Turning Point (4 September 1944)
- Change of Plan (5 September 1944)
- Break out ! (6 September 1944)
- Fall Back ! (8 September 1944)
- The end of a phase (8 September 1944)
- Firming up (9 – 1 September 1944)
- Slowing down (12 – 16 September 1944)
- New Assignments (17 – 23 September 1944)
- Conclusions
- Postscript
- Sources
- Appendixes
Caractéristiques

Historique de la page
- 16/12/2022 : mise à jour (présentation)
- 06/11/2022 : création