Présentation
Traduit de l’allemand, ce livre appartient à la série Die Wehrmacht im Kampf initialement publiée dans les années 1950 et 1960 que Casemate remet au goût du jour en mettant à disposition des versions traduites en anglais. Celui-ci retrace la bataille de Normandie vue du LXXXIV. Armee-Korps à travers son auteur qui fut l’un des membres de l’état-major plus particulièrement en charge du renseignement.
Friedrich HAYN s’appuie à la fois sur ses souvenir et l’exploitation des manuscrits rédigés par ses collègues après les combats pour le compte des services historiques américains (Foreign Military Studies).
Son intérêt est double. Il permet de comprendre l’analyse faite alors par les Allemands sur les combats auxquels ils participent. Et il donne également un aperçu de l’état d’esprit qui règne chez les anciens combattants allemands plusieurs années après la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe.
The 82nd Airborne Division truly honoured its nickname ‘All American’, America the great melting pot!
Friedrich HAYN, Normandy From Cotentin to Falaise, June-July 1944 (Casemate, 2022)
L’admiration de l’auteur pour certains de ses chefs (Erich MARCKS, Erwin ROMMEL, Gerd von RUNDSTEDT, Paul HAUSSER) est plus que palpable aussi bien sur le plan militaire que personnel. Elle est plus timorée pour d’autres à l’image de Dietrich von CHOLTITZ dont on sent que l’aspect relationnel n’est pas son fort. A noter concernant ce dernier une petite pique sur sa popularité en France en raison de son refus de faire sauter Paris en août 1944 alors qu’Erich MARCKS pourrait être crédité de la même gratification pour avoir fait de même en 1940 en tant que chef d’état-major de la 18. Armee qui s’empare de la capitale.
Sur le plan des opérations, le texte donne parfois une vision un peu déconcertante, voire à rebours des idées reçues. Le débat sur le positionnement des divisions blindées allemandes, et plus globalement entre Erwin ROMMEL et Gerd von RUNDSTEDT apparaît ainsi plus général que sur ce seul point précis. L’une des conséquences de considérer que l’ennemi doit être défait sur les plages concerne également le positionnement des troupes sur les littoral lui-même. Visiblement, le choix opéré avant l’arrivée d’Erwin ROMMEL consiste à limiter le nombre d’hommes dans les ouvrages bétonnés sur la côte pour conserver une capacité de manœuvre à l’arrière et éviter de les exposer aux premiers feu. Lors du Débarquement, les unités d’infanterie et positions d’artillerie sont désormais au contraire majoritairement positionnées sur la côte ou immédiatement derrière.

German forces had been organised flexibily behind the main line of resistance. So that it would be possible for local reserves to be created, the strongpoints had been garrisoned by only small number of personnel while the detached troops had been concentrated into mobile standby units. When Field Marshal Erwin Rommel took command of the coastal front, he rescinded this measure in favour of larger garrisons in the strongpoints: ‘The main line of resistance is the coast!’
Friedrich HAYN, Normandy From Cotentin to Falaise, June-July 1944 (Casemate, 2022)
L’auteur souligne que la controverse permet de rapprocher certaines grandes unités du littoral. Mais dans sa narration de la première journée du Débarquement, il ne manque pas de souligner que la résistance des troupes sur les plages ne peut être exploitée faute d’infanterie disponible. En fait, le LXXXIV. Armee-Korps dispose de l’un des régiments de la 352. Infanterie-Division qui erre finalement entre la menace des parachutistes américains et celle des Britanniques débarqués sur Gold Beach qui menacent Bayeux. L’auteur reconnait que la responsabilité en incombe à Erich MARCKS mais que celui-ci se trouve trompé par des rapports s’avérant finalement faux ou erronés sur la présence de parachutistes dans le secteur de Saint-Lô.
Egalement, il souligne la ténacité des unités engagées dans le Cotentin, notamment de la 91. Infanterie-Division. Il attribue la capture de Sainte-Mère-Eglise à la défection d’une unité de la Flak. A contrario, on le sent plus dubitatif sur les actions de la 21. Panzer-Division à la fois contre les parachutistes britanniques et en direction de Luc-sur-Mer. L’importance des ponts sur l’Orne et le canal de Caen à la mer avec notamment celui de Pegasus Bridge apparait clairement puisque la capture par les hommes du Major John HOWARD force les Allemands à un détour conséquent par Caen par ailleurs bombardée et entravée de décombres pour faire basculer des unités d’un côté à l’autre, ralentissant ainsi le renforcement des lignes face aux unités alliées débarquées sur Sword Beach.
Le livre passe relativement rapidement sur les contre-attaques allemandes des jours qui suivent le Débarquement avec les 21. Panzer-Division, 12. SS-Panzer-Division et 130. Panzer-Lehr-Division. Il en attribue l’échec au manque de temps pour coordonner les unités et finalement à la destruction du poste de commandement de la Panzergruppe West à La Caine qui complexifie durant plusieurs semaines la conduite des opérations sur le front normand.
De façon assez classique, l’auteur fait reposer l’échec allemand sur l’absence de la Luftwaffe (mais avec une illustration assez claire sur les communications et les estafettes) et l’impossibilité de réagir rapidement et avec discernement en raison de la rigidité produite par les contraintes d’engagement décidées par Adolf HITLER. Ce ralentissement dans les décisions à prendre et à exécuter est particulièrement visibles dans le cas de la coupure du Cotentin par les Américains où la réarticulation du dispositif allemand perd de précieuses heures qui seront finalement fatales à la plusieurs unités dont une partie de la 77. Infanterie-Division.

Loin du traditionnel récit de la bataille de Normandie, le livre insiste sur les combats sur la Vire et l’Aire (comprenant Saint-Jean-de-Daye et Le Dézert) en amont de la prise de Saint-Lô ainsi que sur ceux après l’échec de l’opération Lüttich lors de la formation de la poche de Falaise, que ce soit face aux Canadiens et Britanniques au Nord, face aux Américains au Sud ainsi que sur la contre-attaque du II. SS-Panzer-Korps afin de permettre la sortie de nombreuses unités.
On notera également à plusieurs reprises la mention de commandants ou de titulaires de postes clefs qui perdent leurs attributions en raison de l’attentat du 20 juillet 1944 (avec par exemple la décapitation de l’organisation de la logistique allemande).
Le sixième chapitre propose quelques réflexions sur la bataille de Normandie : rôle des chars, impact de la supériorité aérienne alliées, moyens de transmission, exercice du commandement, Osttruppen, forteresses). Le dernier se focalise plus sur le renseignement, domaine de spécialité de l’auteur avec un comparatif intéressant entre les moyens humains alloués côté allemand et côté américain. Il semble également que la complexité des unités des britanniques rend plus difficile leur identification alors que les structures américaines sont plus aisées à cerner. Ainsi la façon d’attribuer les noms de code ou les identités postales des unités peut faciliter leur connaissance par l’ennemi.
C’est donc un livre intéressant à condition de prendre du recul et de relativiser certains propos qui traduisent cependant bien une façon de voir les choses (les propos restent ainsi très condescendant vis-à-vis des Américains et des Etats-Unis). Ses remarques également sur les relations avec les Français méritent également l’attention, même si on imagine qu’elles sont parfois un peu caricaturales. Malheureusement, l’éditeur ne propose que trois pages d’avant-propos sans note au fil des pages. Difficile pour un lecteur non averti de faire la part des choses.
Une lecture à compléter pour la vision allemande de Countdown to D-Day, Defending Fortress Europe et Rückzug, The German Retreat From France, 1944. Un témoignage original moins connu que les plus traditionnels rédigés par Hans SPEIDEL, Friedrich RUGE, Dietrich von CHOLTITZ, etc.
Thèmes abordés
- Périodes : Seconde Guerre mondiale 1939/1945
- Fronts : Ouest 1944/1945, France 1944
- Batailles : Normandie 1944, 6 juin 1944, Tête de pont aéroportée américaine en Normandie 1944, Pegasus Bridge 1944, Sainte-Mère-Eglise 1944, Cotentin 1944, Cherbourg 1944, Saint-Jean-de-Daye 1944, Opération Cobra 1944, Bataille des Haies 1944, Opération Lüttich 1944, Poche de Falaise/Trun/Chambois 1944
- Unités : LXXXIV. Armee-Korps, 77. Infanterie-Division, 243. Infanterie-Division, 352. Infanterie-Division, 353. Infanterie-Division, 363. Infanterie-Division, 709. Infanterie-Division, 716. Infanterie-Division, 2. Panzer-Division, 9. Panzer-Division, 21. Panzer-Division, 116. Panzer-Division, 130. Panzer-Lehr-Division, 1. SS-Panzer-Division, 2. SS-Panzer-Division, 12. SS-Panzer-Division, 17. SS-Panzergrenadier-Division, II. Fallschirm-Korps
- Biographies : Erich MARCKS, Erwin ROMMEL, Dietrich von CHOLTITZ
Sommaire détaillé
- Foreword
- Introduction
- The first day (6 June 1944
- The battle of Cherbourg (7-26 June 1944)
- The breakthrough of the Americans (26 June-31 July 1944)
- The Falaise pocket
- The last days in Normandy (18-21 August 1944)
- General observations
- The daily activities of military intelligence
- Formations mentioned in the text
- References
- Index
Caractéristiques
- ISBN : 9781636241562
- Nombre de pages : 176
- Langue : Anglais
- Couverture : rigide sous jaquette
- Reliure : cartonnée
- Dimensions : 16 x 23,5 cm
- Prix conseillé France à la date de parution : N/A
