Puissante, moderne, la Marine Nationale connaît un parcours traumatisant durant la Seconde Guerre mondiale. Si les forces terrestres et aériennes françaises connaissent une défaite claire et nette à l’issue des opérations de mai et juin 1940, la flotte tricolore en subit les conséquences sans pour autant avoir été battue sur les mers. Sa destinée représente un condensé des affres que la France traverse au cours de cette période et qui plus de quatre-vingts ans plus tard pèse toujours sur sa politique intérieure et sa géopolitique extérieure au point d’enflammer régulièrement les débats publics. Illustration avec ce numéro hors-série de LOS !
Recension
Dès le sommaire, ce tortueux parcours se dessine. En choisissant l’unité du sujet et non de temps ou de régime, l’auteur Luc VANGANSBEKE aborde la Marine Nationale comme un tout du premier jour au dernier jour du conflit. En comparaison, les marines japonaise (hors-série n°19), allemande (hors-série n°22), américaine (hors-série n°16) et britannique (hors-série n°25) connaissent des parcours bien plus linéaires même si bien plus denses d’un point de vue engagements navals.
Dans le domaine de la flotte comme dans celui des forces terrestres et aériennes, il apparait que la France investit fortement dans ses moyens militaires durant l’Entre-deux-guerres. La Ligne Maginot ne représente pas le seul investissement. Bien évidemment, il y a des points forts et des faiblesses. Mais pas plus, ni moins que la Royal Navy ou la Kriegsmarine renaissante. Le virage aéronaval en est à ses balbutiements, comme chez beaucoup d’autres. La France peut même se targuer d’être l’un des premiers pays à avoir un porte-avions, même si elle n’en saisit pas l’importance future dans la guerre navale. Sur mer comme sur terre, les responsables restent imprégnés de la Victoire de 1918 et ne sont pas poussés à tout remettre en cause au contraire de leurs homologues allemands.
L’image dépassée et vieillotte des composantes de l’armée française de 1940 vient essentiellement du fait de l’impact de la défaite et de l’arrêt net de tous les programmes d’armement. Une perception que n’ont pas les contemporains. Contrairement à la Première Guerre mondiale, ses bureaux d’études doivent se mettre en sommeil et n’ont pas la possibilité de montrer leur potentiel à s’adapter à une guerre totale et technologique, donc de marquer l’historiographie comme le feront les ingénieurs germaniques.
L’engagement de la marine française de septembre 1939 à juin 1940 reste cruellement méconnu du public. Pourtant, comme le souligne l’auteur, la Drôle de guerre n’existe pas pour elle. A l’instar de la Royal Navy, elle doit déjà lutter contre la menace des sous-marins allemands, même si celle-ci demeure encore limitée durant les premiers mois de la guerre.
La Marine nationale s’implique également très fortement dans les engagements terrestres en jouant un rôle important en Norvège, lors du siège de Boulogne ou encore l’évacuation de Dunkerque (opération Dynamo). Elle intervient également en Méditerranée contre la flotte italienne. Cependant, elle ne peut rien contre l’effondrement sur le sol national et l’occupation de ses installations de la frontière belge à celle espagnole.
Les discussions autour de son avenir illustrent le fragile équilibre des négociations d’Armistice entre volonté de préserver ce qui peut encore l’être et compromis avec la puissance victorieuse et occupante.
Globalement intacte, moderne et puissante, la Marine Nationale fait l’objet de toutes les attentions. Mais elle va périr à quai. Lors de l’opération Catapult symbolisée par le drame de Mers el-Kébir puis à Toulon après l’invasion de la Zone libre. Contrairement à l’Armée d’Afrique, elle n’a pas le temps de se retourner, de passer outre ses hésitations et de rejoindre le camp des futurs vainqueurs. Durant la première moitié du conflit plane l’ombre omniprésente de son commandant-en-chef, l’amiral DARLAN.
Si la grande majorité de la flotte reste fidèle aux institutions de Vichy, plusieurs unités rejoignent progressivement le camp des Forces Navales Françaises Libres (FNFL). La réunification des flottes est plus difficile que pour les autres armes. Mers el-Kébir et Dakar sont passés par là. Chaque camp a ses raisons, mais le sang coulé ne s’efface pas comme cela.
Avec ce numéro, les lecteurs ont entre leurs mains un condensé du drame français de la Seconde Guerre mondiale. Il y voient une flotte puissante, loin d’être ridicule entamer le conflit. Ils comprennent que les hommes et dirigeants de l’époque sont loin d’être individuellement falots, lâches et déserteurs. Nombre d’entre eux meurent et payent le prix de leur engagement au service de leur pays avant toute autre considération politique. La conclusion prend d’ailleurs bien garde à ne pas juger avec les yeux de ceux qui connaissent le dénouement final : “marins, vichystes ou français libres, pour eux, il fut sans doute moins difficile de faire leur devoir que de comprendre où il se trouvait”.
Doté d’une belle iconographie relevée de vues 3D des Bretagne, Dunkerque, Richelieu et Surcouf, LOS ! propose ici dans sa collection des grandes Marines de la Seconde Guerre mondiale un numéro particulièrement abouti. Les engagements des derniers mois du conflit et l’ouverture sur la reconstitution de la Marine Nationale d’après-guerre (sujet encore peu défloré) mériteraient d’être un peu plus développés, mais la place manque. Mais il est particulièrement heureux d’avoir conserver une approche nationale et non par régime.
Sommaire
- “Honneur, patrie, valeur, discipline”, la Marine française dans la seconde Guerre mondiale
- Une superbe Marine, situation au 3 septembre 1941
- L’Amiral de la Flotte, Darlan, du marin à l’homme politique
- Le bras armée, les navires de la Flotte en 1939
- Pas de Drôle de guerre pour la Royale
- Du Nord à la Méditerranée, la campagne de France
- Opération Catapult, le drame de Mers El-Kébir
- Sous la francisque au service de Vichy
- Sous la Croix de Lorraine, les Forces Navales Françaises Libres
- L’union, les forces navales de la France combattante
- Un bilan particulier, la Marine française à la fin de la guerre
Dessins et profils couleurs
- Cuirassé Bretagne (vues 3D)
- Cuirassé Dunkerque (vues 3D)
- Morane-Saulnier MS.406 “406C1”, EC 564, Madagascar, 7 mai 1942
- Cuirassé Richelieu (vues 3D)
- Sous-marin Surcouf
Cartes
- Poches de Dunkerque et Calais, 25 mai 1940
- Bombardements de Mers el-Kébir, 3 juillet 1940
- La bataille de Diego Suarez, 5-8 mai 1942
Caractéristiques
- Nombre de pages : 114
- Langue : Français
- Reliure : brochée
- Dimensions : 21 x 29,7 cm
- Prix conseillé France à la date de parution : 14,90 € TTC
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