Ligne de Front n°89 (Caraktère, 2021)

Panzergrenadier, un fantassin de choc… mais rare ! Sur le terrain mais également dans l’historiographie. Pourtant, le concept est novateur au début de la Seconde Guerre mondiale et l’un des artisans des succès initiaux du Blitzkrieg qui ne dit pas encore son nom. La couverture particulièrement dynamique ne peut que donner envie d’ouvrir ce numéro, d’autant qu’un document exceptionnel est annoncé à propos du NKVD face à l’opération Barbarossa

Publicités

Dans son format habituel d’un peu plus de quatre-vingt pages, ce numéro de Ligne de Front comprend six pages d’actualités diverses et se structure en cinq articles principaux, tous centrés sur la Seconde Guerre mondiale.

Le premier est la suite de l’étude sur la 1. Skijäger-Division dont la première partie se trouve dans le numéro précédent. Outre une très belle série de clichés des stocks de matériels de transport hivernaux remisés à l’arrivée des beaux jours, le champ chronologie emmène le lecteur sur le seconde semestre 1944 mettant en avant les efforts allemands pour redresser la situation face à l’Armée Rouge à l’été 1944, notamment sur la Vistule. Comme les Français en 1940 sur la Somme, ils sont cependant incapables de résorber toutes les têtes de pont soviétiques, sauf justement à Annopol en raison notamment de l’engagement de la division qui permet également de contenir partiellement celle de Sandomierz-Baranov d’où partira l’opération Vistule-Oder quelques mois plus tard. Suivent ensuite les combats en Slovaquie fin 1944. Il faut patienter jusqu’au prochain numéro pour se pencher sur les combats de 1945. L’iconographie comprend également une très dramatique séquence d’évacuation de blessés allemands et l’ordre de bataille détaillé qui ne s’arrête pas aux matériels lourds mais s’intéresse aux effectifs.

Publicités

Le clou du numéro est probablement la transcription du journal d’un chef de détachement du NKVD de la 50ème armée soviétique enfermé et tué dans la poche de Briansk lors de l’opération Taïfun en direction de Moscou. Outre le récit lui-même particulièrement illustratif du ressenti et du fonctionnement de l’Armée Rouge, l’article bénéficie d’un travail éditorial précis qui en quelques notes seulement permet de resituer les événements vécus avec déroulé des opérations. Efficace sans dénaturer un récit particulièrement poignant, surtout en ce qui concerne les jours précédents immédiatement la mort du rédacteur.

Le dossier principal de ce numéro concerne l’infanterie motorisée puis blindée allemande au cours de la Seconde Guerre mondiale à travers deux articles : l’un sur l’évolution générale du concept, l’autre sur le SdKfz 251, le semi-chenillé à tout faire de la Wehrmacht. Les succès de Fall Gelb à l’Ouest en 1940 et des premiers mois de l’opération Barbarossa reposent sur la concentration de grandes unités blindées mais aussi sur leur accompagnement motorisé en infanterie. C’est là tout le changement de prisme opéré par les Allemands durant l’Entre-deux-guerres. Le char n’accompagne plus le fantassin à la vitesse de ce dernier. C’est désormais l’infanterie qui accompagne les blindés au rythme de ceux-ci. La réussite de la percée allemande de la Meuse à la Manche repose ainsi sur la capacité des fantassins à épauler les divisions blindées allemandes qui forcent la brèche et l’aptitude des divisions motorisées à coller derrière et à tenir le terrain en attendant que les divisions d’infanterie traditionnelles arrivent. C’est ainsi que les toutes premières contre-attaques contre la tête de pont d’Abbeville buttent d’abord sur la 2. Infanterie-Division (mot.).

Cependant, malgré le recours à la main d’œuvre forcée et à l’exploitation extensive des territoire occupés, le sous-dimensionnement chronique de l’industrie d’armement du III. Reich par rapport aux besoin du conflit ne permet jamais une dotation complète des unités en infanterie mécanisée. Tout comme le reste de l’arme blindée, les divisions existantes voient leur potentiel s’étioler irrésistiblement et les nouvelles divisions ne sont jamais correctement équipées. Article très complémentaire à celui de Benoît RONDEAU paru dans 2e Guerre Mondiale48 qui intègre quelques exemples d’engagement.

Le moyen de transport et de combat de l’infanterie motorisée puis mécanisée est en théorie le SdKfz 251. Laurent TIRONE présente une bonne synthèse de cet engin, fruit de ses travaux parus dans Trucks & Tanks Magazine n°7 et Trucks & Tanks Magazine hors-série n°15 maintenant difficilement trouvables. Cependant, le sous-titre présentant le SdKfz 251 comme un atout majeur des Panzergrenadiere est quelque peu en contradiction avec l’article précédent démontrant justement que la grande majorité des bataillons n’en est pas dotée. Il faut dire que la plateforme est aussi abondamment utilisée pour compenser les autres carences en matériels spécialisés et d’appui-feu. Bref, les Panzergrenadiere font le boulot, mais sans véritablement bénéficier de semi-chenillés. La partie immergée de l’iceberg passe quelque peu sous le radar des photographes des compagnies de propagande et de l’historiographie consacrée à ce thème.

Ce numéro contient également un historique des parachutistes italiens qui aborde la période post-1945 à l’ère contemporaine.

Un très bon numéro dont la seule véritable réserve concerne toujours l’utilité des quatre pages d’actualité tirées du très bon blog Zone militaire, mais dont les billets sont facilement accessibles sur internet. Une analyse de l’évolution des matériels et des concepts d’emploi des armées contemporaines par rapport aux menaces actuelles ou perçues comme futures ferait un excellent pont avec l’histoire militaire qui reste l’ADN de cette revue.

Sommaire

  • Musée, exposition
  • En bref
  • Actus du livre
  • Yann MAHE, 1. Skijäger-Division, division d’élite et d’exception ! (2ème partie), in Ligne de Front89 (Caraktère, 2021) : article de vingt-quatre pages relatant la formation de la 1. Skijäger-Division à partir de la brigade au même nom, son engagement sur la Vistule contre la tête de pont d’Annapol, dans les Carpates entre Pologne et Slovaquie – Texte, cartes, ordre de bataille, photos, profils couleurs.
  • Didier LAUGIER, Za Rodinou ! Un officier du NKVD dans la tourmente, in Ligne de Front89 (Caraktère, 2021) : article de douze pages transcrivant le journal de bord d’un officier du NKVD auprès de la 50ème Armée soviétique dans la poche de Briansk où il trouve la mort procurant de nombreux détails sur la vie quotidienne au sein de l’Armée Rouge à l’automne 1941 face à aux opérations Barbarossa et Taïfun – Texte, cartes, photos.
  • Luc VANGANSBEKE, Ni homme, ni bête, mais… Panzer-Grenadier !, in Ligne de Front89 (Caraktère, 2021) : article de quatorze pages relatant sur l’infanterie d’accompagnement de l’arme blindée allemande au cours de la Seconde Guerre mondiale mettant en avant sa spécificité doctrinale en début de conflit, son adaptation aux conditions de la guerre et aux carences industrielles – Texte, cartes, ordre de bataille, photos, profils couleurs.
  • Laurent TIRONE, La famille des SdKfz 251, l’atout majeur des Panzergrenadiere, in Ligne de Front89 (Caraktère, 2021) : article de dix pages sur le SdKfz 251, ses différentes versions et déclinaisons – Texte, photos.
  • Marco PETRELLI, Les Arditi Distrittori della Regia Aeronautica, une histoire des parachutistes italiens, in Ligne de Front89 (Caraktère, 2021) : article de dix pages sur les parachutistes italiens de leur création au XXIème siècle – Texte, photos.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.