Si la Seconde Guerre mondiale voit de nombreuses innovations technologiques (radars, missiles, etc.), une révolution doctrinale dans l’emploi de l’arme blindée et la mécanisation des armées, elle voit aussi les premières utilisations opérationnelles de l’arme aéroportée et son emploi presque systématique dès lors qu’il faille franchir des obstacles ou porter le combat directement dans la profondeur ennemie. Loin de rester confinée dans les seules armées occidentales, l’arme aéroportée devient universelle et demeure toujours d’actualité, malgré l’utilisation désormais extensive des hélicoptères. De quoi illustrer parfaitement l’évolution sous-tendue par le titre. Une histoire passionnante, largement méconnue pour la partie post-1945, dans ce livre de Nikolaos THEOTOKIS chez Pen & Sword.
Cet ouvrage est donc une contribution majeure dans l’histoire du parachutisme militaire. Après avoir abordé l’origine du parachute, il revient sur les quatre pays pionniers de son utilisation militaire (URSS bien sûr, Italie, Grande-Bretagne et Etats-Unis). Première surprise, l’Allemagne n’est pas dans le peloton de tête, malgré des bases conceptuelles jetée par Hans von SEECKT dès 1921, véritable visionnaire de l’armée allemande après 1918. Mais elle se rattrape très vite au point d’être le premier pays à utiliser les parachutistes à des fins opérationnelles, en Norvège d’abord, puis en Hollande. Après la Crète, leur utilisation relève davantage de l’emploi tactique, voire commando. Les troupes aéroportées sont ensuite principalement utilisées à des fin purement terrestres et les divisions parachutistes allemandes levées en nombre dans la seconde moitié du conflit n’ont de parachutistes que le nom.
Le cheminement britannique est inverse. D’autres nations rejoignent les pays dotés d’une arme aéroportées, souvent bâties avec l’aide de la Grande-Bretagne : Pologne, Belgique, Canada, Grèce, Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud.
Les premières grandes opérations aéroportées alliées débutent avec l’invasion de la Sicile puis de l’Italie et se poursuivent en France (Normandie et Provence). C’est la première époque durant laquelle débarquements riment avec parachutistes et vice-versa. La seconde époque s’ouvre avec l’opération Market-Garden. Les parachutistes sont désormais utilisés non plus pour sécuriser une zone d’assaut, mais pour faciliter l’avance dans la profondeur ou enjamber plus facilement l’obstacle lors des opérations de franchissement du Rhin. Ce sont désormais des largages massifs concomitants de plusieurs divisions.
L’Asie et le Pacifique sont également touchés par cette mode suivant l’exemple de ce qui vient de se passer en Europe en 1940. Les Japonais sont les plus prompts à mettre en oeuvre leurs unités, suivis par les Indiens et Gurkhas sous l’impulsion britanniques, mais également les Chinois. Les Américains ne sont ensuite pas en reste (Nouvelle-Guinée, Philippines, Camalanugan).
Un chapitre entier est également consacré aux sauts de type commandos y compris auprès de la résistance. Original, un chapitre aborde également les parachutes des aviateurs obligés d’évacuer en l’air leurs appareils.
Le succès est tel que bien d’autres pays se dotent de parachutistes avant même la fin de la Seconde Guerre mondiale : Bulgarie, Roumanie, Finlande, Portugal, Espagne, Serbie, Turquie, Pérou, Argentine, Brésil…
Le dernier tiers du livre (hors notes et annexes) se consacre aux opérations après Seconde Guerre mondiale. Et là, c’est une véritable découverte à chaque page qui témoigne de l’intensité des engagements militaires sur l’étendue du globe : Indonésie (1946-1949), Albanie (1947-1952), Malaisie (1948-1960), Corée (1950-1953), Indochine bien sûr (1946-1954), Algérie bien sûr aussi (1954-1962), Chypre (1955-1960), Suez (1966), évacuation des U-2 (1960), Tunisie (1961), Cuba (1961), guerre israélo-arabes, guerres indo-pakistanaises, Nouvelle-Guinée (1961-1963), Borneo (1963-1966), Yemen (1964-1967), Congo (1960-1965), République dominicaine (1965-1966), Tchad (1969-1993), Anguilla (1969), Oman (1970-1976), Timor oriental (1975-1999), Djibouti (1976), Vietnam, Irlande du Nord, Chypre (1974), Ouganda, Afghanistan (époque soviétique), guerre Iran-Irak, Gambie (1981), Malouines (1982), Liban (1982), Grenade (1983), Kaschmir (1984), Honduras (1988), Panama (1999), guerres du Golfe, Somalie, Sierra Leone (2000), Afghanistan (post-2001), Sumatra, République Centrafricaine et enfin Mali.
Bien entendu, les engagements ne sont pas particulièrement détaillés. Ils deviennent d’ailleurs plus souvent héliportés plus que véritablement parachutés. Mais cette longue liste témoigne de l’immense spectre d’engagements militaires largement passés sous silence des magazines spécialisés, et c’est bien dommage.
Relié avec un peu moins de trois cent pages, le livre est d’un abord très accessible à partir du moment où l’on pratique a minima l’anglais. Une bibliographie de dix pages (écrites en petits caractères bien serrés) proposent un très large éventail de lectures complémentaires qui font envie. Un cahier photos de seize pages complète le tout. Une invitation à se plonger dans l’après 1945 ! Le champ est donc bien plus large que les Ligne de Front hors-série n°15 et 16 sur les parachutistes de la Seconde Guerre mondiale. Ces deux numéros comportent néanmoins une iconographie importante que ne propose pas ce livre mis à part son cahier photos central. Deux références incontournables en français sur le sujet des parachutistes.
Sommaire :
- The Origin of Military Parachuting
- The Four Pioneer Nations
- The German Paratroopers
- The British Paratroopers
- Other Allied Paratroopers
- Allied Airborne Operations in Europe (I)
- Allied Airborne Operations in Europe (II)
- Japanese, Indians, Gurkha and Chinese Paratroopers
- Allied Airborne Operations in the Pacific
- Second World War Special Operations Units
- Parachutes and Pilots in the Second World War
- Other Paratroopers
- Post-1945 Operations (I)
- The Arab-Israeli and Indo-Pakistan Wars
- Post-1945 Airborne Operations (II)
- Airborne Forces and the Vietnam War
- Airborne Operations and Air Assaults, 1972-2018