Batailles & Blindés hors-série n°40 (Caraktère, 2019)

Lorraine 1944 ou l’illustration des difficultés alliées face au redressement allemand sur le Front de l’Ouest immédiatement après la Normandie… Dans ces combats, finalement tout le monde y perd, à l’exception des Soviétiques : les Alliés ne seront pas à Berlin avant eux et les Soviétiques davantage en position de force à Yalta en février 1945 qu’à Moscou en octobre 1944. De leurs côtés, les Allemands laissent passer l’occasion de donner quelques sérieux coups de griffe dont les effets auraient été bénéfiques lors de la bataille des Ardennes.

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En effet, si la victoire alliée en Normandie est totale, elle n’est pas définitive. Mais pas seulement. En effet, en cette fin août 1944, les Alliés possèdent plusieurs atouts dans leur manche. Le premier, il n’est pas de leur fait, est l’ampleur du désastre allemand subi à l’Est qui rend schizophrénique le haut-commandement allemand qui doit faire face à plusieurs catastrophes en même temps en des endroits diamétralement opposés. Le second est le débarquement d’une force d’invasion en Provence qui remonte le couloir rhodanien  sans grande résistance mais avec une lenteur certaine laissant plusieurs milliers d’Allemands se replier du Sud-Ouest de la France. Le troisième est la possession d’une réserve stratégique aéroportée. Le quatrième est la niveau de mécanisation de ses unités qui permet d’avancer très vite. Le cinquième est la toute puissance aérienne.

En face se trouvent des reliquats d’unités, de nouvelles formations constituées à la va-vite, des classes d’âge soit très jeunes, soit déjà âgées avec du matériel distribué avec parcimonie même si performant. Sans compter une quasi absence de protection aérienne.

Pourtant, les mois de septembre et d’octobre douchent les espoirs alliés. Envolée la percée sur le Rhin en Hollande : au-delà de l’échec de Market-Garden, les combats dégénèrent en combat d’usure. Envolée la percée en direction de la Sarre en passant par la Lorraine. Envolé le passage en force des Vosges. Après la prise d’Aix-la-Chapelle, c’est la coup d’arrêt dans la forêt de Hürtgen. Et bientôt, les forêts des Ardennes vont se réveiller…

Comment expliquer ce retournement ? La logistique joue bien entendu un rôle… mais ce n’est pas une excuse. Les principes de base de la stratégie militaire existent toujours : faire des choix, concentrer ses forces, les préserver, etc. Pourtant les deux adversaires commettent erreur sur erreur. Côté allié, dispersion des efforts, surestimation de l’adversaire, méconnaissance des contraintes géographiques et météorologiques. Côté allemand, plans opérationnels inadaptés à la situation et aux forces disponibles, gaspillage de ressources malgré un flair opérationnel certain. Les échecs des uns et des autres ne sont pas tellement le fait de la troupe ou de l’adversaire mais bien ceux de leurs décisions de commandement.

Ce numéro hors-série de Batailles & Blindés traduit bien cette situation, malgré deux chefs emblématiques et brillants dans leur domaine : PATTON et von MANTEUFFEL. Il procure davantage de hauteur de vue que Ligne de Front n°78 qui se focalise sur l’opposition Panzer-Brigaden vs. US Armored Divisions à Arracourt.

Le franchissement de la Moselle est plus que délicat. Il n’y a pas beaucoup d’exemple où les Américains se voient refouler de leur tête de pont. La difficulté à prendre Nancy est bien plus préjudiciable en terme de perte de temps que la labarieuse prise de Metz. Côté allemand, la volonté de ne pas subir est là, le rêve d’infliger un coup d’arrêt saignant est recherché : c’est le fruit de l’expérience acquise à l’Est. Mais les meilleurs retours gagnants se sont déroulés quand un minimum de conditions de succès étaient réunies, ce qui n’est pas le cas à Arracourt ou à Dompaire. Si les Alliés peuvent se permettre quelques (lourdes) erreurs, les Allemands sont condamnés à un sans-faute impossible…

Bien vu le portrait successif des deux chefs qui s’opposent dans deux annexes. La Ligne Siegfried mérite bien mieux que deux pages, ce qui est pour ainsi dire rien du tout et un peu hors sujet pour des combats en Lorraine. Cela dit, l’étude de cette ligne de fortification serait passionnante que ce soit sur son état en 1940 ou en 1944/1945. Sachant que nombres d’enseignements sont repris dans le Mur de l’Atlantique.

Sommaire

  • Introduction
  • Loïc BECKER, Nancy, le XII Corps en difficulté, in Batailles & Blindés hors-série n°40 (Caraktère, 2019) : article de huit pages sur les tentatives de franchissement de la Moselle du XII US Corps de la 3rd US Army en vue de la prise de Nancy au début de la bataille de Lorraine durant lesquels s’opposent 35th US infantry Division, 80th US Infantry Division et 4th US Armored Division aux 3. Panzergrenadier-Division, 15. Panzergrenadier-Division, Flieger-Regiment 92 et 553. Volksgrenadier-Division – Photos, cartes profils couleurs (Jeep Willys du 42nd US Cavalry Squadron).
  • Le XII Corps en avant toute, Château-Salins et Nancy
  • Repartir à l’assaut, le XII Corps fait un bond vers l’Est
  • La Sarre à portée de main, dernier saut de puce
  • Vers l’Est, Metz et la Moselle, le premier verrou
  • Avancer à tout prix, éviter les coups d’arrêt
  • Secteur de Metz, prendre le Fort Driant
  • Capturer Thionville… pour encercler Metz
  • Mets encerclée ! Le nettoyage de la ville
  • Au Sud de Patton, incursion dans le dispositif de la Third Army
  • Annexe 1 : Patton le magnifique
  • Annexe 2 : Hasso Ecard von Manteuffel, un Prussien dans la Wehrmacht
  • Annexe 3 : La Ligne Siegfried, une muraille pleine de trous
  • Conclusion, Lorraine 1944, l’occasion manquée de Patton, un coup d’arrêt inattendu…

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