Ce numéro du magazine Batailles édité par Ysec possède un sommaire très teinté 1940 avec des articles qui retiennent l’attention.
Assez peu abordé en détail dans la littérature spécialisé, le projet d’invasion avortée de la Grande-Bretagne par le III. Reich (opération Seelöwe) est ici assez bien décrit. L’article entre dans le détail des différentes options possibles et sur les antagonismes qui existent entre les forces terrestres, maritimes et aériennes de l’armée allemande. Les débats ne sont pas sans rappeler ceux qui agiteront ensuite le commandement allié quant au Débarquement allié en Normandie… L’importance de la neutralisation préalable de la Royal Air Force (RAF) est évidente. Méconnus, sont aussi les effets des raids aériens britanniques sur les concentrations allemandes d’embarcations dans l’attente d’un hypothétique feu vert. Là aussi, ces sont des questions qui se poseront plus tard aux Alliés. Ils réussiront à dénier tout accès à la Luftwaffe à leurs zones de concentration. Dans la littérature consacrée au Débarquement allié, il y a certes les enseignements tirés des précédentes opérations aéronavales alliées, mais il y aussi l’analyse de l’échec de l’opération Seelöwe et des moyens déployés pour entraver les Allemands qui a été source d’enseignements… Et dont n’ont pas su tirer partie les Allemands.
Si l’opération Seelöwe a un moment été envisagée, c’est que préalablement la France a été balayée. Ce numéro ouvre une étude sur la création de l’armée de Paris quand les Allemands ont déclenché la seconde phase de leurs offensives à l’Ouest avec l’opération Fall Rot. Même si la Ligne Weygand, qui n’est qu’un mince rideau défensif appuyé sur la Somme et l’Aisne, a fait illusion quelques heures grâce au sacrifice et à la ténacité des soldats français, le déséquilibre des forces est trop important. Il n’y aura pas cette fois-ci de miracle de la Marne. Pour illustrer l’effondrement malgré le courage des unités françaises, l’article prend l’exemple de la 4ème Division d’Infanterie Coloniale (DIC). Engagée dans la région d’Amiens, elle doit chercher le repli et tenter de s’échapper de l’encerclement en combattant par Saint-Just-en-Chaussée. Mais les Allemands ont l’avantage de la vitesse d’exécution grâce à une vision globale du champ de bataille rendue possible par la maîtrise de leurs lignes de communication et de commandement qui restent cohérentes compte tenu de la tendance des combats. Contrairement à l’armée française qui affronte un ennemi beaucoup trop fort alors qu’elle a déjà été amputée d’une part importante de son corps de bataille dans la première partie des opérations en mai. C’est aussi le sacrifice inutile du 34ème Bataillon de Chars de Combat (BCC) de la 1ère Division Cuirassée (DCR) à Lieuvillers. Au nord de Paris, le front français s’est volatilisé et l’armée de Paris est créée en urgence dans la nuit du 8 au 9 juin 1940 avec l’apport de deux corps d’armée et de six divisions, pour certaines en très mauvais état (dont la 4ème Division d’Infanterie Coloniale). Etude à suivre…
La tragédie du char Renault R35… Tout est dit dans l’article de cet article. Certes, les Français possèdent plus de chars que les Allemands dont les montures sont d’ailleurs assez peu puissantes. Mais il n’y a pas que le doctrine et la stratégie qui pèchent côté Français. Certains matériels en nombre sont en effet bien mal conçus et impropres à l’usage qui est attendu d’eux. L’armée allemande est à ce stade du conflit beaucoup plus cohérente et homogène (cf. La Wehrmacht de Fall Gelb). L’article est sans appel : armement, motorisation, protection, ergonomie, vision – tout est à jeter pour le char français le plus en dotation en 1940.
Autre engin finalement peu adapté aux conditions qu’il rencontre au combat, l’hydravion Latécoère 298. Original, l’article décrit les engagements des différentes escadrilles en 1940 (T1, T2, T3 et T4). Sa carrière continue néanmoins tout au long du conflit au sein de l’Armée d’Armistice et dans l’armée française reconstituée en 1944 et 1945.
L’Asie est également au sommaire avec un article sur la 14th US Air Force en Chine au cours de la Seconde Guerre mondiale – un front à découvrir d’ailleurs et un autre sur les opérations amphibies en Cochinchine en 1950 qui comprend un zoom sur les LVT-4 Alligator engagés au combat par les Français en Indochine. Une vraie bonne initiative que d’avoir inscrit à l’ordre du jour de chaque numéro un article sur ces combats oubliés d’après-guerre qui sont l’illustration réelle, non pas d’une Wehrmacht 1946 qui n’a existé que dans les bureaux d’études et quelques terrains d’essais, mais d’une armée française 1946, voire 1950, bien réelle cette fois-ci !
Pour terminer, il ne faut pas oublier le reportage sur le très beau musée MM Park qui bénéficie d’un agencement moderne et des surfaces suffisantes pour mettre en valeur ses superbes collections.
Pour la petite histoire seulement, un seul est l’auteur de tout le contenu, à l’exception des notes bibliographiques. C’est du mérite !
Sommaire :
- Biblio
- Notes de lecture
- Yves BUFFETAUT, L’épave du croiseur léger USS Juneau (CL-52) a été découverte le 17 mars 2018, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, Un abri de défense passive retrouvé intact, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, Le MM Park de La Wantzenau, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, Le Latécoère 298 et ses escadrilles, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, La tragédie du char Renault R35, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, La création de l’armée de Paris, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, Seelöwe, l’opération qui n’a jamais eu lieu, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, La 14th US Air Force en Chine, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, 1950, opérations amphibies en Cochinchine, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
- Yves BUFFETAUT, Le LVT-4 Alligator, organisation en Indochine, in Batailles n°82 (Ysec, 2018)
Très beau magazine, avec des sujets souvent très intéressants. Mon seul regret, c’est que le rédacteur en chef ne juge pas utile de payer certains de ses pigistes. Il y en a un qui attend depuis près de deux ans qu’on lui paie certains articles