Empruntant le titre « Barbarossa déraille » à l’étude du spécialiste américain David GLANTZ de l’Armée Rouge sur les batailles de Smolensk à l’été 1941, le magazine 2ème Guerre Mondiale propose un numéro hors-série expliquant pourquoi l’invasion de l’URSS par la Wehrmacht en juin 1941 était vouée à l’échec.
Tout d’abord, la préparation de l’opération est particulièrement « légère » dans les domaines du renseignement et de la planification logistique. Les buts de guerre sont eux-mêmes confus avec un mélange détonnant d’objectifs politiques, militaires, économiques et idéologiques eux-mêmes remplis de préjugés raciaux propres au régime nazi.
Si les victoires des deux premières années de la guerre couronnent une certaine supériorité de la Wehrmacht, elles n’en reflètent pas moins des faiblesses préoccupantes liées au manque de potentiel industriel et à une renaissance trop rapide qui a engendré des choix et des négligences préjudiciables pour des conflits globalisés et longs.
L’Armée Rouge est effectivement de son côté « un géant endormi ». Ses ressources sont immenses et elles recèlent de nombreuses pépites qui ne demandent qu’à pousser à condition que le système les laisse se développer.
Au travers de trois batailles, Stéphane MANTOUX illustrent finalement assez bien les causes de l’échec de l’opération « Barbarossa ».
La première concerne la prise de la citadelle de Brest-Litovsk, ancienne ville polonaise annexée par l’URSS en 1939. Si les Allemands finissent par mettre la main sur la ville qui est de toute façon débordée de tous les côtés compte tenu de la situation stratégique, Brest-Litovsk annonce l’âpreté des futurs combats urbains à l’Est dont Stalingrad sera le fait le plus marquant. Bien que perdus, les soldats russes montrent un esprit de résistance et de sacrifice hors du commun. Ces résistances vont clairsemer jour après jour un peu plus les rangs des unités allemandes qui ne disposent pas de réserve en hommes et en matériels alors que la victoire finale n’est pas encore en vue. C’est une différence majeure avec les combats de mai-juin 1940. Même si les pertes ont été sensibles, beaucoup d’unités allemandes ont finalement été peu engagées et usées. Et quand l’Armistice est signée, le « reste à conquérir » est relativement réduit et la défense complètement exsangue.
Seconde illustration de l’échec de l’opération « Barbarossa » : les combats autour de Smolensk. Longtemps, Smolensk a été vu comme éclatante victoire allemande que les contre-attaques soviétiques n’ont pas empêchée. En fait, la réalité est plus nuancée. En quelques semaines, l’Armée Rouge englue totalement le centre de l’offensive allemande. Les pertes augmentent en flèche et la Wehrmacht se retrouve assaillie de toutes parts et doit parfois redonner du terrain gagné. A Smolensk, la Wehrmacht doit reculer ! La seule échappatoire pour conserver l’initiative reste de dérouter Guderian et ses unités blindées vers le sud pour réaliser le gigantesque encerclement de Kiev. Il est vrai que l’Armée Rouge réalise ce tour de force au prix d’un sacrifice terrible qu’elle seule peut se permettre. Ses réserves sont immenses et le système ne permet pas une quelconque révolte contre cette stratégie. Déjà, on perçoit les clefs opérationnelles de l’Armée Rouge et de la Stavka : user, arrêter, repousser et chercher à détruire l’adversaire à l’aide de combinaisons d’offensives rythmées dans le temps et dans l’espace.
La troisième bataille étudiée, très peu connue malgré son importance, est celle d’Odessa où les Roumains échouent à prendre le port soviétique qui sera finalement évacué tel un « Dunkerque » sur la Mer Noire. Odessa illustre déjà le manque de fiabilité des alliés du Reich qui compte tenu de ses ressources limitées et de l’immensité soviétique doit faire appel à des supplétifs. Ce siège montre également une autre faiblesse : l’absence du contrôle de l’espace maritime faute d’une puissance navale et aérienne suffisante. Odessa annonce Sebastopol et Leningrad. Sebastopol annonce Stalingrad. L’Armée Rouge et ses soldats présentent une résistance que la Wehrmacht n’a pas encore rencontrée d’une façon aussi généralisée. A chaque fois, elle doit consentir des pertes irremplaçables qui s’accumulent. Ses moyens techniques ne lui permettent pas de s’affranchir de ces longs combats d’usure ou hommes et matériels doivent être au contact.
Ce numéro est donc fort utile pour comprendre les clefs militaires de la défaite allemande à l’Est (qui ne se transforme pas encore en victoire soviétique). Le choix des affrontements retenus est pertinent et vaut bien mieux que des longs récits chronologiques. Quelques tableaux statistiques illustrent bien les textes. Le comparatif entre les forces estimées par les Allemands et celles réelles de l’Armée Rouge montre clairement le cœur de l’erreur d’appréciation des dirigeants politiques et militaires du Reich.
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